En Allemagne et en Angleterre, plusieurs influenceurs bien connus ont été mis au pilori ou rappelés à l’ordre au cours des derniers mois. Motif: ils ont partiellement – voire totalement – omis de déclarer avoir fait de la publicité pour un service ou un produit, et avoir reçu des prestations monnayables à cet effet. Une telle obligation de déclaration et de transparence s’applique également en Suisse, même si elle est moins réglementée par la loi. Les principes de la Commission Suisse pour la Loyauté (CSL) font autorité en la matière.
Le marketing d’influence est en plein essor. En Suisse, l’on estime à près de 2500 le nombre d’influenceurs qui produisent du contenu pour leurs fans sur Facebook et Instagram, et la tendance est à la hausse. D’innombrables micro et petits influenceurs supplémentaires pèsent dans la balance, à partir de 500 followers déjà. Malheureusement, nombre d’entre eux sont peu enclins à montrer comment ils gagnent leur vie. Dans le cadre de la promotion – plus ou moins maladroite – d’un produit, ils voyagent vers une destination idyllique, se laisse choyer dans un hôtel de luxe ou se voient offrir un abonnement de fitness, toujours avec beaucoup enthousiasme. Ces derniers mois, de nombreux influenceurs allemands et anglais ont été mis en garde et poursuivis en justice pour un tel manque de transparence. Avec un écho retentissant dans les médias (sociaux). Depuis, tous les influenceurs suisses devraient avoir compris que la transparence est non seulement une question d’honnêteté mais une obligation non négociable.
Pas de vide juridique
Un coup d’œil aux comptes Instagram des plus grands influenceurs suisses confirme qu’ils sont encore négligents à ce sujet. Toutefois, ils n’ont pas trop à s’inquiéter d’être poursuivis. En effet, les principes de la Commission Suisse pour la Loyauté sont des lois non contraignantes et ne peuvent donc pas être appliquées devant les tribunaux. La CSL n’opère pas dans un vide juridique; ses principes reposent sur des bases juridiques telles que la loi contre la concurrence déloyale (LCD), sur des directives telles que celles du Code consolidé sur les pratiques de publicité et de communication marketing de la Chambre de commerce internationale ainsi que sur l’expérience de la CSL.
Obligation de mention claire
Le principe correspondant de la CSL est l’article B.15, qui traite de la séparation entre information rédactionnelle et communication commerciale. Le paragraphe 1 stipule: «La communication commerciale, quelle que soit la forme qu’elle prend ou quel que soit le support publicitaire qu’elle utilise, doit être clairement distinguée et clairement séparée du reste du contenu.» On peut directement en déduire que les influenceurs doivent toujours faire apparaître une mention lorsqu’ils perçoivent une compensation quelle qu’elle soit. La Commission Suisse pour la Loyauté n’a pas encore reçu de plainte à cet effet. Cela peut s’expliquer par le fait que même si le sujet est largement débattu dans les médias, il ne dérange pas le public outre mesure. Du moins, tant qu’il ne fait pas l’objet d’une plainte.
L’autorégulation est en vogue
La position de l’OCDE, de l’UE et du Conseil fédéral montre que le principe d’autorégulation est tout sauf dépassé. En raison de la surcharge de travail des tribunaux, ces derniers se sont engagés il y a quelque temps à encourager le règlement extrajudiciaire des différends (Alternative dispute resolution ADR) – autrement dit l’autorégulation – plutôt que les procédures juridiques. Le Conseil fédéral soutient ces efforts: «Lorsque l’autorégulation et l’autocontrôle fonctionnent de manière satisfaisante (…) il n’y a pas lieu de légiférer.» (avis du Conseil fédéral sur la motion Stump (06.3373) «Interdiction de la publicité sexiste»). Toutefois, il ne s’agit en aucun cas de donner carte blanche aux influenceurs. Bien au contraire. S’ils ne veulent pas que le législateur entre en action, ils feraient bien de respecter les règles d’honnêteté et de loyauté.
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Signature : Thomas Meier, chargé de la communication de KS/CS Communication Suisse