L’Annuaire sur la Qualité des médias, publié par l’Université de Zurich, est toujours un moment très attendu par le monde médiatique suisse.
Cette année, l’accent a été mis sur l’impact des médias de l’audiovisuel public par rapport aux médias privés. Le résultat est novateur (nous n’avions jusqu’à présent aucune donnée de ce type) et permet de relancer le débat pour plaider en faveur d’une meilleure entente. Que la presse désigne constamment le service public comme responsable de la baisse des audiences print et online est tout simplement absurde. Nous en avons désormais la preuve : c’est même le contraire !
N’en déplaise à l’association « Schweizer Medien », qui réunit les principaux éditeurs alémaniques. Ne pouvant contester les résultats de cet institut universitaire, elle attaque aujourd’hui la méthode : « Cette étude ne répond pas à la véritable question de savoir si les utilisateurs utiliseraient plus intensément l’offre des médias privés s’il n’y avait pas d’offre en ligne gratuite de la SSR. De même, l’étude ne tient absolument pas compte du budget-temps effectivement consacré à l’utilisation des différentes offres médiatiques, ce qui jette de sérieux doutes sur les conclusions de l’étude. »
Absurde !
Si nous prenions cet argument à contrario, pourrait-on affirmer que si tous les médias de service public disparaissaient, tous les Suisses se contenteraient de lire les médias suisses et de regarder uniquement les chaînes de télévision privées helvétiques ? Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts, et le digital permet aujourd’hui à n’importe quel individu sur la planète d’avoir accès à toute l’offre médiatique mondiale !
L’annuaire met également en avant des faits préoccupants concernant la concentration de la presse écrite. Les deux tableaux ci-dessous montrent l’impact de la position dominante des deux groupes alémaniques, CH Media et TX Groupe, sur la diversité des contenus. La traduction des articles a considérablement augmenté le nombre de thématiques nationales ou internationales au détriment des sujets régionaux. Or, dans un système fédéral, cette tendance pose des questions existentielles quant au rapport entre les cantons et la Confédération. Les Suisses n’élisent pas des autorités au niveau national, mais bien au niveau local. La presse écrite ne peut se prévaloir de jouer un rôle en faveur de la démocratie suisse si, en même temps, elle appauvrit le discours politique pour des raisons économiques. Comme l’a rappelé le Conseiller fédéral lors du Forum des médias romands : « Les éditeurs suisses continuent à faire des bénéfices. » Ne l’oublions pas !