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#Edito : L’ère de l’éléphant blanc a-t-elle commencé pour Tamedia ?

En Inde pré-coloniale, les maharadjas avaient pour coutume de s’offrir des éléphants blancs pour présent. La rareté de ses animaux donnait une signification toute particulière à ce geste, mais cette même rareté pouvait se transformer en un cadeau empoisonné. Car s’occuper d’un tel animal nécessite d’importants moyens pour l’heureux propriétaire.

Quel lien avec la presse suisse ? J’y viens. L’annonce du lancement en Suisse romande des plateformes en ligne Watson (CH Media) et Blick.ch (Ringier) sort TX Groupe et sa branche média Tamedia de sa zone de confort. Seule plateforme nationale gratuite et en ligne, 20 Minuten/minutes pouvait jusqu’à présent se permettre de compter sur les forces éditoriales du groupe pour combler les thématiques qu’elle ne couvrait pas.  Des économies d’échelles indéniables qui, combinées avec un inventaire publicitaire national, faisaient de cette marque média le support le plus rentable du groupe.

En ira-t-il de même en 2021 ?
L’arrivée l’an prochain de concurrents sur le créneau de la presse en ligne oblige 20 Minuten/minutes a revoir son offre thématique. En effet, l’annonce de la création d’une équipe dédiée au sein de la rédaction alémanique de 20 Minuten montre bien que le sport va devenir un enjeu de taille. Car Blick.ch a bien repéré l’espace laissé libre par Le Matin et pas comblé par le matin.ch. Et pour contrer Watson, voici que Tamedia se voit obligée de proposer des thématiques plus sociétales afin de garder les femmes, un des cibles visée par le site de CH Media.

On le comprend, les éditeurs suisses ne se feront aucun cadeau. La Suisse romande va être le terrain où tous ces éléphants blancs vont devoir coexister dans un contexte économique très défavorable pour les médias. Les concurrents de TX Group le savent parfaitement. Mais ils ont moins à perdre que leur concurrent déjà présent en terre romande car ils sont dans l’offensive, ce qui est toujours mobilisateur pour les équipes internes. De plus, ils apparaissent comme des éditeurs recruteurs face à un éditeur qui ne cesse de licencier. Enfin, ce déploiement leur permet de proposer de l’inventaire publicitaire national et de prétendre à de possibles aides fédérales comme des acteurs de la cohésion de ce pays.

Il n’en va autrement pour Tamedia. Ici, point de projet novateur. On accuse le coup et l’on se voit obligé de répartir ses forces éditoriales sur une plateforme gratuite au détriment des marques payantes. Et à nouveau d’annoncer des licenciements après bien d’autres départs. Sans parler du gâteau publicitaire romand qu’il va falloir partager avec deux autres éléphants blancs….

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