Il a commencé sa carrière de marketeur par les biens alimentaires, notamment au sein des marques Zweifel, Henniez Waters et Danone. Des nourritures terrestres, il est ensuite passé au monde des médias en entrant chez Tamedia Publications romandes en 2009. Responsable du marketing et des ventes, il a été en charge de tous les titres romands pendant sept ans.
Le virus de la presse ne l’a plus quitté : en 2015, il prend la direction d’Inédit Publications S.A. qui produit 150 publications par an de Terre & Nature S.A. et de l’agence spécialisée en solutions numériques Mediancer Sàrl.
Si les magazines thématiques spécialisés souffrent moins que la presse généraliste, les défis sont les mêmes : changement d’habitudes de consommation, baisse des volumes publicitaires, diffusion multi-support. Raison de plus pour miser sur le service et l’innovation, deux piliers chers à l’industrie des biens de première consommation que Jean-Paul Schwindt connaît bien. La boucle est donc bouclée !
Comment est né Inédit Publications ?
Tout a commencé, voici 19 ans, par la publication de brochures communales. Depuis, nous publions 150 publications par an pour 27 titres différents. Nos 30 collaborateurs représentent 18 métiers dont la PAO, de la direction artistique, des polygraphistes, la correction des textes, des journalistes, des chefs de projet, des marketeurs et des commerciaux. En 2014, Inédit Publications, a racheté l’agence Mediancer, une société spécialisée allant du développement de sites Internet aux produits numériques sur plateformes mobiles. Nous avons travaillé jusqu’à présent côte à côte, mais cette année, nos deux sociétés vont fusionner.
Cela signifie-t-il que votre cœur de métier va changer ?
Non. La publication de magazines reste notre première mission ; mais il est évident qu’il faut s’adapter et surtout anticiper les nouveaux modes de consommation des médias.
Pourtant vous étiez en avance sur vos concurrents. Le « Custom publishing », si décrié voici encore peu, apparaît à l’aune de la crise de la presse généraliste comme l’un des seuls modèles d’affaires viables. Qu’en pensez-vous ?
On confond souvent le « Custom Publishing » avec « Content Marketing ». Faire du contenu spécialisé ne signifie nullement que l’on soit complaisant. Nous ne sommes pas une agence de communication qui réalise du contenu en fonction d’une campagne, mais une solution éditoriale pour des marques qui veulent externaliser la production de leurs publications. Une manière d’assurer un revenu fixe dans un contexte publicitaire instable. Ceci dit, les lecteurs ne s’y trompent pas : ils savent faire la différence entre le rédactionnel et du contenu promotionnel.
Comment s’est construit votre portefeuille de titres ?
Au fil des ans, des associations comme des marques nous ont contactés pour nous confier la création ou la gestion de leurs magazines, parfois seulement pour le contenu, le graphisme ou l’impression et, plus récemment, pour la création d’applications et de versions e-papers.
Cette croissance par opportunités s’est faite principalement par le bouche à oreille. Cela nous a permis de nous diversifier et de nous spécialiser dans de nombreux secteurs qui vont du médical, en passant par la grande distribution, l’hôtellerie de luxe, les transports ou la viticulture, etc.
Contenu, contenant, publicité et impression : vous êtes actifs sur toute la chaîne de valeur.
Oui, tel est notre objectif et nous sommes également un apporteur d’affaires pour notre imprimerie Courvoisier, spécialiste dans les magazines haut-de-gamme. Toutefois, nous offrons la possibilité à nos clients de travailler avec d’autres prestataires si nos coûts sont supérieurs. Mais l’idée est de mettre à profit l’intégralité de notre expérience.
Qui gère les titres : des pools de journalistes ou des équipes fixes ?
Dès que nous recevons un nouveau mandat, nous le confions à un chef de projet qui va constituer une équipe composée de journalistes internes et de pigistes spécialisés dans la thématique. Puis un directeur artistique et un graphiste vont être désignés, en fonction de leur sensibilité, pour la création de la maquette. Une fois celle-ci validée, on démarre la production.
Les titres que vous gérez sont généralement gratuits et distribués de manière très large.
Pour nous la gratuité n’a pas une connotation négative. Une majorité des titres que nous réalisons tirent à des dizaines de milliers d’exemplaires et sont diffusés via un adressage qualifié. C’est ce que recherchent les annonceurs. Pour preuve Inside, le magazine de la Clinique La Prairie, ou Regards, celui du Beau-Rivage Palace, la banque Landolt & Cie et depuis peu le Lausanne Palace, contiennent de la publicité de marques de luxe. Dans Focus PME, qui vise les chefs d’entreprise, on retrouve les mêmes publicités que dans la presse économique payante. Les lecteurs ne font plus la différence tant la gratuité des médias semble une évidence, surtout pour les plus jeunes. D’où une grande partie des difficultés des éditeurs de la presse payante.
En 2013, le groupe Gassman rachetait Blickpunkt KMU, au tirage de 57 000 exemplaires. Une année plus tard, vous avez lancé la version romande – Focus PME – diffusée à 23 000 exemplaires. L’occasion de proposer une combinaison publicitaire nationale ?
Les stratégies des annonceurs changent. On ne peut que constater que leurs investissements dans le print se réduisent. Par conséquent toute nouvelle combinaison publicitaire, surtout si elle est nationale, est à même d’intéresser les marques. En tant qu’éditeur qui a intégré une régie commerciale, nous nous sommes intéressés au digital. Et grâce à Mediancer, nous proposons également des solutions comme du e-paper et des applications natives. L’intégration de cette équipe de développeurs est une chance pour nous, car elle nous amène une nouvelle culture dans notre manière de travailler.
La diversification passe justement par le développement de nouveaux services. Quels sont vos projets pour 2016 ?
Le contenu et le digital nous amènent aujourd’hui à nous intéresser au Community Management. Nous sommes en train d’élaborer un service à la la carte à destination des PME. Ces entreprises n’ont souvent ni les moyens, ni le volume pour justifier d’un tel engagement mais elles sont prêtes à payer pour un suivi professionnel. Car le suivi sur les réseaux sociaux ne peut plus être improvisé. Textes, photos, choix des plateformes : tout évolue sans cesse. Par ailleurs, nous nous intéressons également au e-commerce.
De quoi s’agit-il ?
Nous voulons développer une plateforme B2B sous la marque Focus PME afin de mutualiser des services à destination des entreprises que nous touchons. Nous allons commencer par thèmes. Ainsi, en septembre nous allons recenser tous les prestataires pour les fêtes de fin d’année (restaurants, cartes de vœux, cadeaux, etc.). Chaque trimestre, nous développerons une nouvelle thématique avec des informations par canton. L’idée est de compléter cette base de données afin de générer du trafic et du revenu.
Quel sera le modèle d’affaires de cette plateforme ?
Un prix forfaitaire pour figurer sur le site et le print, puis un taux de commissionnement par transaction. Nous allons gérer le suivi de A à Z : de la qualité de la prestation à la coordination avec les prestataires. Ce n’est qu’en offrant de la qualité que nous pourront fidéliser ces entreprises.
Comment expliquez-vous cet attrait pour le serviciel ?
Au fil de ma carrière, j’ai été amené à mandater et à consulter de nombreuses études qualitatives. Chaque fois on arrive au même résultat : moins on dispose de temps et moins on remet en question le prix et le contenu. Par conséquent, le public sera toujours prêt à payer pour un service de qualité qui allège les contraintes de son quotidien. L’être humain est plus rationnel qu’on ne l’imagine.
Cet intérêt pour l’évolution des modes de consommation vous a poussé à revenir sur les bancs de l’Université. Pourquoi avoir choisi la sociologie alors que vous avez un MBA ?
Parce que cette discipline permet une autre grille de lecture. Je me suis intéressé au mobile qui est voué à devenir LE support universel. J’ai été surpris de constater qu’il n’y a quasiment aucune étude en sciences sociales sur ce thème. C’est ce qui m’a poussé à faire mon travail de mémoire sur le Smarphone.
A quelles conclusions arrivez-vous ?
Que la fonction sociale qui a prévalu pour la presse, la radio ou la télévision s’applique également au mobile. Sur un smartphone, les applications de média permettent, grâce à la géolocalisation, de proposer une lecture du monde très locale. L’appartenance et la réassurance sont et restent au cœur du système médiatique. Les nouvelles technologies n’y changent rien.
Ce qui change, c’est le choix du support…
Juste. Pour les jeunes « Z », le mobile correspond à la télévision des Baby Boomers. Chaque génération croit être porteuse d’une révolution médiatique mais, dans les faits, nous assistons chaque fois au mythe de Sisyphe. En fait, le conformisme règne et les dispositifs sociaux sont tellement forts qu’ils peuvent s’adapter à toutes les innovations.
Ces constations vous aident-elles dans votre quotidien professionnel ?
Après avoir travaillé pour de grands groupes, devenir le responsable d’une PME m’a amené à voir différemment la réalité du terrain. A cette échelle, on réalise à quel point c’est l’humain et non la notoriété de son entreprise qui a de la valeur. Mais la résistance au changement est partout la même. Il est vital de rester dans une logique très agile de « test and learn », de savoir soutenir les nouveautés et d’arrêter les tentatives infructueuses.
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