Edito

La guerre des éditeurs n’aura… pas lieu ?

Les bruits courant autour du lancement d’un dominical par le groupe Ringier se sont finalement révélé erronés. Daniel Pillard, responsable de Ringier Romandie, m’a confirmé que le projet a finalement été abandonné. « Le dimanche, c’est un vieux serpent de mer ! » Surtout pour cet éditeur qui avait dû fermer son titre dominical (Dimanche.ch) en 2003, faute d’avoir trouvé un public suffisant. Et à l’époque l’on ne parlait pas de crise de la presse ! Cette année là, le Matin Dimanche comptait 591’000 lecteurs, alors que Dimanche.ch n’en réunissait « que » 120’000 après 4 ans d’existence. La digue orange n’avait pas cédé, continuer n’était pas rentable !

Mais alors, pourquoi revenir avec cette marotte dans le contexte actuel de crise de la presse écrite ? La réponse a pour nom Le Temps. Tant que Ringier et Tamedia (qui a repris la participation d’Edipresse lors du rachat du groupe lausannois) étaient coactionnaires à part égales (49%), le statu quo était de mise en Suisse romande. Or, concurrents en terres alémaniques et alliés en terres francophones, ce paradoxe ne pouvait durer éternellement et c’est d’ailleurs l’une des raisons de la vente de ce titre. Désormais, la situation est claire et chaque groupe affûte ses armes pour conquérir un gâteau publicitaire qui ne cesse de s’amenuiser.

Dans le règne animal, la compétition pour les ressources se résout de deux façons : l’exploitation ou l’exclusion. Dans le premier cas, les espèces ajustent leur distribution à la densité des aliments disponibles, de sorte que chaque individu obtienne le même taux de rendement par temps consacré à la nourriture. Dans le second, on parle de compétition par exclusion. Il en va de même dans le monde économique, où l’on a le choix entre s’entendre… ou se dévorer.

La première option aurait été possible si Ringier s’était contenté de gérer des magazines, mais le rachat du Temps le propulse sur le terrain des journaux. L’autre source de tension a trait au nouvel équilibre que Ringier va devoir créer entre Le Temps et l’Hebdo. En supposant que le premier occupe la scène les cinq premiers jours de la semaine et que le second soit distribué le samedi (ce qui serait le plus logique), ce dispositif viendrait à inquiéter le Matin Dimanche qui voit ses ventes et son lectorat baisser. Le week-end, le public est à la recherche de divertissement plus que d’analyses politiques. La nouvelle refonte du seul dominical avec un plus gros cahier (Le Mag) atteste de ce changement.

L’équilibre est fragile. La mise au placard du projet dominical est certainement momentanée. Ringier a déjà bien du pain sur la planche avec la création d’une newsroom commune à L’Hebdo, Le Temps et Edelweiss. Mais une fois qu’elle fonctionnera, le lancement d’un dominical online et gratuit ne serait ni si compliqué, ni trop cher. La seule certitude est que les éditeurs sont désormais condamnés à bouger s’ils ne veulent pas perdre des annonceurs : ceux-ci ne peuvent comprendre pourquoi les tarifs des annonces restent inchangés alors que les audiences sont partout à la baisse.

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