Inde-Chine, plus d’un milliard d’habitants chacun. Le tigre et le dragon. Tous mes élans vont du côté du tigre, animal bien plus séduisant selon moi. Pourtant, le dragon ne se laisse pas oublier. Je reçois ces jours un message électronique de deux artistes suisses en résidence à Pékin. Deux autres prendront bientôt le relais. On a pu voir l’an dernier au Kunstmuseum de Berne une partie de la collection Sigg, riche de quelque 1200 pièces. Difficile de ne pas s’en rappeler puisqu’un politicien UDC avait offert un large éclairage à l’événement. Il avait porté plainte, choqué par une mouette sur laquelle avait été greffée une tête de foetus humain. Il y avait là de quoi renforcer l’image peu amène du dragon chinois…
Pourtant, l’oeuvre était plutôt sage par rapport à d’autres travaux de ce qu’on qualifié d’art brutal, ou cruel, et qu’on a surtout vus en Occident à travers leur archivage vidéo. Ces mouvements « hard » ont aujourd’hui plus ou moins vécu. Et, heureusement, La collection d’Uli Sigg, ancien industriel, qui fut ambassadeur de Suisse en Chine, aujourd’hui vice-président de Ringier, donne un bien plus large spectre de la production contemporaine du « Pays du milieu ». Elle est représentative des rêves et des doutes, des expansions et des replis, brefs de tous les soubresauts de cet immense volcan.
Un volcan, un dragon… Les images qui surgissent pour parler de la Chine sont étonnamment proches. Elles sont sans doute significatives des peurs que suscite cette région du monde au moins depuis une célèbre citation de Napoléon reprise en titre par un essayiste français des années 1970. Ces prochaines années, il va falloir apprendre à dompter ces peurs, faute de pouvoir dompter le dragon. Et il faudra aussi se rappeler que les tigres ne se domptent pas si facilement non plus. Et puis peut-être avant tout relire Le Petit Prince et ses jolies réflexions autour du mot apprivoiser.