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L’ère du transmédia

Pascal Crittin

Le 5 avril dernier, le nom du nouveau directeur de la RTS était dévoilé. Pascal Crittin connaît bien la maison : il a été successivement directeur d’Espace 2, puis secrétaire général de la radio suisse romande avant de devenir, suite à la convergence, directeur des affaires générales de la RTS.

Vous venez du monde de la musique classique et de la radio, et vous avez participé à la convergence radio-TV qui a donné naissance à la marque RTS. Quelle sera la prochaine étape ?
Celle de l’expérience transmédia qui permet de multiplier et de faire cohabiter différentes expériences utilisateurs. Cela sera possible avec une diversification de nos formats et la co-création de la part du public. Peu à peu le service public va se transformer en un bien public. Le patrimoine audiovisuel est celui de nous tous, le développement des réseaux sociaux et du big data vont nous permettre d’augmenter la qualité de cette mise en relation.

Le temps semble bien loin quand, en 2009, le feu vert pour la convergence entre la télévision et la radio avait suscité tant de méfiance !
Notre mode de production par vecteurs ne permettait pas alors de concevoir que la production de programmes de radio et de télévision pourrait se faire de manière transversale. C’est devenu une évidence avec l’évolution des modes de consommation des médias qui se font de plus en plus à la carte et par thématique plutôt que par canal de diffusion seulement.

La RTS a été leader dans le basculement digital. Des expériences comme Nouvo ont rencontré un large succès sur les réseaux sociaux. Toutefois, si votre avenir semble assuré sur la Toile, la question de la consommation TV se pose de plus en plus, notamment à l’aune des habitudes de la génération Y qui ne regarde plus les programmes en linéaire.
Il est bien évident que nous n’allons pas attendre que les Millenials vieillissent et retrouvent leur poste dans leur salon : à nous d’aller les trouver sur les plateformes qu’ils préfèrent ! Cela implique un changement de stratégie pour tous les médias, qui ne peuvent plus se contenter d’offrir des contenus, mais doivent comprendre les nouvelles attentes du public et y répondre. La difficulté, c’est que l’on doit adapter les formats existants à une réalité future en constante évolution.

Comment sera la télévision de demain ?
Dans un avenir proche, on peut imaginer une télévision de programmation diffusée en numérique et sur de la HBBTV, qui coexistera avec une télévision individualisée et au contenu adapté pour une diffusion sur des plateformes de partage de type YouTube. A l’heure où tout devient vidéo, les frontières actuelles entre médias vont disparaître.

L’intérêt pour la consommation non linéaire ne cesse de croître…
Oui, certaines études prédisent qu’en 2020, plus de 50% de la consommation TV se fera par le biais du rattrapage. Cela doit nous interpeller sur la capacité des médias de nous faire partager une expérience collective. Par quelles approches allons-nous continuer à créer du lien social ? De nouvelles approches doivent être imaginées car les filtres des réseaux sociaux, contrairement à leur promesse, enferment plus le débat qu’ils ne l’ouvrent.

Vous avez été fortement impliqué dans le choix du nouveau bâtiment de la RTS à Lausanne, et vous l’inaugurerez en 2020. Symbolise-t-il cette approche transmédia que vous souhaitez mettre en avant ?
Ce bâtiment va en effet concrétiser mon projet d’entreprise. L’horizontalité de sa structure exprime notre envie de transversalité entre les modes de production, d’écriture et de diffusion. Ce lieu, qui sera bien plus qu’un projet immobilier, se veut surtout un lieu de rencontre entre différents producteurs de contenus et l’EPFL. Le potentiel créatif conjugué à l’intelligence collective : on ne saurait imaginer un lieu plus propice à la création des médias de l’avenir.
Après notre installation en 2020 sur le nouveau site lausannois, nous transformerons nos centres de production (actu, sport et magazines) genevois selon la même dynamique transversale.

On ne saurait finir ce premier interview sans aborder la question de l’initiative « No Billag ». Comment allez-vous vous profiler dans ce débat ?
Il est important de rappeler ce que l’on fait et ce que nous apportons à la Suisse romande. Je pense qu’il est plus que jamais vital que le service public soit totalement transparent sur les prestations qu’il propose grâce à la redevance. Cela passera notamment par des rencontres publiques et des débats, car notre mission est d’être avant tout utile à la collectivité que nous représentons géographiquement.

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