Cominmag.ch

Les rencontres de KS-CS : Interview de Cédric Jotterand, Journal de Morges

L’Association faîtière KS/CS Communication a demandé à Patrick Zanello d’interviewer des professionnels de la communication romande. Cominmag profite de ce pont de l’Ascension pour les publier sur sa plateforme afin de compléter la démarche lancée avec ses Cominmag Live auprès des agences de communication romande au temps du Covid-19.

Après quelques semaines de semi-confinement, comment allez-vous au Journal de Morges ?
Bien, merci! Nous avons réagi immédiatement après les premières annonces en réunissant toute l’équipe autour d’un credo: sortir le journal quoi qu’il arrive comme prévu durant la crise. Deux minutes après, le téléphone s’est mis à sonner sans discontinuer avec à chaque appel l’annulation d’une annonce. Nous avons avancé notre tirage tous ménages qui couvre tout le district (38000 exemplaires) avec un message qui disait «Restez chez vous, nous .y serons aussi!» Ca tient depuis un mois en ayant réduit les horaires, introduit le télétravail et trouvé des partenariats avec des acteurs de la place pour financer au moins les coûts techniques (impression et distribution) le plus longtemps possible. Sur le plan rédactionnel, les sujets ne manquent pas et nous avons pénétré dans des endroits où nous n’allons pas si souvent comme les soins intensifs, la place d’armes ou un atelier pour enfants autistes. Avec toujours dans l’idée d’amener un regard « positif » sur ce qui se fait dans notre région et jamais dresser, par exemple, le nombre de morts vu que ces infos tournent en boucle ailleurs. Nous avons aussi dopé le contenu du site internet, virage que nous avions presque pris, mais la crise est arrivée juste un peu tôt. Cela nous vaut toutefois une belle audience et par extension des nouveaux abonnés, 4-5 par jour, ce qui est très élevé à notre échelle.

Sur le plan publicitaire, nous avons essayé de passer le message aux commerçants ouverts ou actifs dans la livraison à domicile que nous étions à leurs côtés en proposant des offres ciblées pour eux. Avec comme exemple un partenariat génial tissé en 45 secondes avec l’association des Vins de Morges. Nous publions un quiz sur la région chaque vendredi et tirons au sort deux gagnants par semaine qui ont la surprise de voir débarquer un vigneron avec un carton de six bouteilles, ceci afin de promouvoir leur action de livraison à domicile gratuite. Cela nous a amené beaucoup de sympathie, plus de 1500 réponses à ce jour et finalement un sponsoring inattendu!

C’est quoi le monde d’après pour votre média ?
C’est toujours le papier, plus que jamais, car ce support doit rester le rendez-vous physique avec la population d’autant qu’une grande partie de nos lecteurs ne jure que par lui. De plus son absence de la table de la cuisine ou du salon (en passant aux 100% numérique) ferait courir le risque de l’oublier petit à petit. En revanche, nous voyons bien qu’une « deuxième » clientèle existe et que les informations que nous sortons lui plaisent mais le support doit être uniquement numérique. Ainsi, nous mettons les bouchées doubles pour finaliser notre nouvelle plateforme, avec la possibilité – enfin! – de s’abonner immédiatement par carte de crédit alors que notre système est encore manuel, ce qui constitue un solide handicap aujourd’hui. Ça paraît évident et banal de proposer un tel service mais je peux vous assurer que sa mise en place n’a pas été une partie de plaisir!

Si on parle un peu business, quels sont vos gros challenges à venir ?
Avec plus de 6’000 abonnés, un chiffre important pour un journal local, nous avons une assise intéressante et un ancrage qu’il faut garder. Mais surtout renouveler, principalement par de nouveaux clients numériques. Ils ne compenseront cependant jamais – ou alors on ne parlera pas du même journal – l’apport des annonceurs. Il y a deux enjeux à court terme et que nous ne maîtrisons pas: le premier est que nos petits et moyens annonceurs (des PME) puissent se remettre rapidement au travail et puissent dégager suffisamment de moyens pour continuer à annoncer dans nos pages. Le second est de convaincre des entreprises plus grandes – avec des points de vente dans la région – de nous utiliser plus souvent, preuve ayant été faite en un mois de notre importance et de notre rôle de témoin numéro un de la vie régionale. Reste enfin les questions liées à l’aide à la presse, celles d’urgence et celles sur la durée, dont nous n’avons aucune idée mais qui s’imposent à mon sens au minimum pour diminuer le coût de la distribution postale.

Dans cette période spéciale, quel livre, quelle série, quelle chanson recommandez-vous aux membres de CS ?
Lire n’est pas vraiment évident en ce moment, du sport serait plus indiqué pour décompresser. Un condensé idéal serait «L’autoportrait de l’auteur en coureur de fond», d’Haruki Murakami, délicieux essai sur le marathon, d’autant qu’on est en plein dedans. Plus qu’une chanson, je fais tourner en boucle l’album des «Années américaines» de Véronique Sanson. Et «La méthode Kominsky» comme série avec Michael Douglas parfait en prof de comédie sur le déclin mais maître de l’ironie. Car il en faut!

Quitter la version mobile