Deuxième vague après le changement de la méthodologie Mach Basic, il va sans dire que le marché attendait cette édition. La progression de la presse gratuite allait-elle se confirmer ? La réponse est plutôt décevante…
La première impression que donne la lecture de la vague 2014-1, portant sur la période octobre 2012 à fin septembre 2013, c’est que le média presse continue à perdre globalement des lecteurs, journaux gratuits également. Les promesses de la nouvelle étude Mach 3, qui annonçait voici six mois une forte profession de ce segment, semblent n’avoir été qu’un feu de paille. Tout n’est pas totalement perdu car les pertes enregistrées par 2014-1 placent encore les audiences des gratuits au-dessus des valeurs de la dernière étude Mach Basic (2012-2). Mais la tendance est à la baisse : -17 000 pour GHI, – 11 000 pour Migros Magazine, -10 000 pour 20 Minutes -3 000 pour Le Régional et Gazette de la Région, -2 000 pour le Courrier Neuchâtelois et Arc Hebdo. Quelle explication donner ? A ce sujet les éditeurs sont très circonspects. S’ils ne peuvent expliquer les pertes de 2014-1, ils comprennent encore moins les gains de 2013-2. « La faute à la nouvelle méthode de calcul qui a modifié l’échantillon des interviewés de l’étude », lancent certains.
Du côté de la Remp, l’institut de recherche qui conçoit cette étude, on concède qu’en intégrant des interviews par mobile et internet, on a de facto « urbanisé » l’échantillon. « Mais cela correspond à la réalité du pays. » Sinon, aucun changement n’a été apporté à la méthodologie Mach 3. Et de rappeler que l’étude 2014-1 porte sur 12 mois et non sur 24 mois, comme pour les précédentes vagues. « Dès 2014-2, nous aurons une période d’analyse plus longue. » D’ici là, force est de constater que les variations de lectorats sont, mis à part celle du Matin semaine et de Top Matin, comprises dans l’intervalle de confiance.
Qui gagne et qui perd ?
Puisqu’ils sont moins nombreux, voyons ceux qui, dans un tel contexte, gagnent des lecteurs. La palme revient à Bon à Savoir qui en séduit 22 000 nouveaux. Coopération en additionne 2 000, Bilan et Swissquote 3 000. La presse régionale remporte aussi des victoires avec La Liberté (5 000), Biel-Bienne (3 000), La Gruyère (2 000), Le Nouvelliste (1 000). Presse spécialisée et presse locale, rien d’étonnant. Ces deux créneaux sont ceux qui sont les plus porteurs car ceux qui offrent des contenus uniques et orientés vers des publics-cibles bien définis.
Les variations négatives étant nombreuses, limitons-nous au plus fortes comme celle de la famille Matin (-26 000 pour semaine et -17 000 pour le Matin Dimanche). Rappelons que la perte de 8,2% du Matin semaine est significative. Des baisses à mettre en relation avec la réduction du tirage de ces deux titres. : en 2013, le tirage du Matin Dimanche a été réduit de 13’533 exemplaires et celui du Matin semaine de 3’486 exemplaires. Il en résulte donc que l’audience de ce dernier titre a chuté significativement plus fortement. Mais compte tenu de la perte de tout le segment gratuit (le Matin semaine pouvant être associé à cette catégorie puisqu’il est principalement lu dans les cafés et que ce sont les restaurateurs et non les lecteurs qui paient l’abonnement), la question d’une sous-pondération pour 2014-1 face à une surpondération en 2013-2 reste ouverte.
Le groupe des magazines grand public et féminin perd aussi des lecteurs : L’Hebdo (-13 000), L’Illustré (-9’000), Femina (-10 000), Edelweiss (-3 000). Deux segments qui peinent à se réinventer tant sur le print que sur le web.
Autre segment qui subit le développement des technologies numériques : la presse télévision. La généralisation des box offrant les programmes en temps réel met en question la lecture de ces supports. Et leur contenu ne suffit pas pour séduire les lecteurs : Top Matin (-20 000), TV8 (-14 000), Guide TVCinéma (-13 000).
[ASIDE] Un mal qui fait du bien ?
Dans un trend baisser comme connaît désormais la presse, la publication semestrielle d’une étude d’audience était vraiment nécessaire ? Si tous les éditeurs soutiennent officiellement Mach 3, certains, loin des micros, regrettent de payer pour un outil marketing qui les dessert. La Remp, qui va fêter ses 50 ans, connaît ce discours. Quand les chiffres sont bons, personne ne se plaint. Mais que faire dans un contexte où les beaux jours sont définitivement derrière soi ?
La réponse vient des agences média. Pour Chris Flückiger, le CEO de Mediatonic, « le marché suisse a une énorme chance de posséder un tel outil marketing. Les éditeurs ne peuvent s’en prendre à cette étude car ce sont eux qui ont souhaité sa périodicité semestrielle et qui ont mandaté la Remp pour qu’une nouvelle étude soit élaborée. La réponse est Mach 3. » Donc tout est résolu ? « Non, poursuit ce spécialiste des médias. Le nœud du problème, ce n’est pas les audiences mais le pricing. Si les titres veulent garder leurs CPM tout en perdant des lecteurs, alors ils doivent baisser leurs tarifs. Or, personne ne le fait. Mach 3 nous permet d’introduire des éléments qualitatifs dans une négociation très quantitative. » Autrement dit, d’introduire de la souplesse dans un modèle de tarification figé.[/ASIDE]