En comparaison avec la presse alémanique, le tableau de la presse romande montre un plus fort attachement des lecteurs francophones, notamment à leur presse régionale et aux magazines Special Interest.
Habituellement, les données Mach Basic, qui mesurent l’audience de la presse, sont publiées avant celles de TotalAudience, une étude intermédias qui cumule lecteurs et internautes. Il en va différemment cette année, car Total Audience se base pour la première fois sur les dernières données de Mach Basic, en l’occurrence celles de 2015-1, et sur celles de Net-Metrix-Profile 2014-2. L’enjeu est de taille, car face aux médias numériques, qui donnent des données en temps réel, la presse dépend d’études basées sur des sondages. Ainsi, entre la période des questions et celle de l’analyse, on obtient un décalage de six mois. Ainsi, la période d’étude de Mach Basic 2015-1 nous donne la photographie de la réalité du 6 octobre 2013 au 29 septembre 2014.
La palme aux régionaux
Au fil des dernières vagues de Mach Basic, le nouveau paysage de la presse romande commence à se dessiner. Certes, des lecteurs ont été perdus, mais globalement les titres résistent. Alors que l’on pensait que les gratuits (Matin Bleu et 20 Minutes) auraient tôt fait de réduire en cendres une presse locale et payante, voici qu’elle montre l’exemple en continuant à gagner des lecteurs. Les deux titres de Tamedia – 24Heures (-8000 lecteurs) et La Tribune de Genève (-1000 lecteurs) – sont les seuls avec le Journal du Jura à être dans le rouge. A l’inverse, Le Nouvelliste affiche l’une des plus belles progressions : avec une croissance de 11000 lecteurs, il confirme que son avance sur la Tribune de Genève n’a rien d’accidentelle.
Il sera très intéressant de suivre les prochains chiffres concernant les deux régionaux de l’arc lémanique. L’audience de 24Heures et de La Tribune de Genève se déplace en nombre vers le web. Cette réalité a amené leur éditeur à installer depuis le début de l’année un paywall sur les deux sites de ces titres. Désormais, l’abonnement offre une lecture globale print + web. Si l’on sait que cette décision a eu une incidence sur le nombre de visites online, qu’en sera-t-il pour la version papier ?
Destins différents pour les transrégionaux
Si Le Matin semaine a repris des couleurs (+19000 lecteurs, plus forte progression de cette vague), suite à l’arrivée du nouveau rédacteur en chef, Grégoire Nappey, qui a réussi à lui imposer un ton plus urbain et moins sensationnaliste, Le Matin Dimanche ne peut, dans cette vague, connaître l’impact de sa nouvelle formule. En effet, celle-ci n’a pas pu être analysée, puisqu’elle est survenue en septembre 2014, date de la fin des interviews de 2015-1.
La situation du Temps (-10000 lecteurs), qui affiche son audience la plus basse à 89 000 lecteurs, ne reflète pas l’état actuel du titre ; en effet, rappelons que ce titre est entré dans le giron du groupe Ringier en avril 2014, et qu’il a un nouveau rédacteur en chef (lire l’interview de Stéphane Benoit-Godet dans l’édition Cominmag de mars 2015) depuis septembre 2014. 2015-2 nous dira si le nouveau positionnement du titre lui a permis de reconquérir des lecteurs.
Les gratuits à la peine
Même s’il est erroné de comparer les titres gratuits de la grande distribution avec les hebdomadaires gratuits et 20 Minutes, force est constater qu’à part le Courrier Neuchâtelois (+5000 lecteurs) et Arc Hebdo (+5000), tous perdent des lecteurs, la plus forte perte étant celle de GHI (-22000 lecteurs), qui est significative.
Les magazines grand public vs Special Interest
La situation des généralistes est relativement stable. L’Illustré reste à 339.000 lecteurs et L’Hebdo, dont la formule a changé fin avril 2014, perd 13.000 lecteurs. Bien que ce résultat soit non significatif, il démontre que le nouveau découpage du contenu et la nouvelle maquette n’ont pas réussi à attirer de nouveaux lecteurs. Un problème pour Ringier Romandie qui s’apprête à absorber Le Temps et à lancer une newsroom commune pour L’Hebdo, Le Temps et Edelweiss. Ces trois titres sont à la peine, si l’on en juge la mise en commun des contenus entre Bolero (39.000 lecteurs) et Edelweiss (63.000 lecteurs) qui doivent faire face à leurs concurrents : en Suisse alémanique, Annabelle (222.000 lecteurs) et en Suisse romande, Femina (311.000 lecteurs).
Pour les Special Interest, la situation est bien meilleure. Bon à savoir est l’exception qui confirme la règle avec une perte significative de 51.000 lecteurs. Sinon, Générations Plus (+5.000 lecteurs), Cuisine de saison (+3.000), Terre et Nature (+3.000) continuent leur progression. Une situation réjouissante mais qui ne traduit qu’une partie de la réalité du marché. En effet, les journaux progressent plus online que les magazines. La régularité des parutions joue en faveur des quotidiens alors que le confort de lecture sur le papier favorise les magazines. A suivre…