Les Chiffres

Le verre est-il à moitié vide ou à moitié plein ? #MachBasic #SR

Voici une nouvelle vague des études des audiences de la presse écrite. Alors que ces données étaient, voici encore peu, l’alpha et l’oméga du marché publicitaire, que signifient aujourd’hui ces résultats ?

2017-1 analyse la période de septembre 2015 à septembre 2016. La fin de L’Hebdo n’est par conséquent pas encore prise en compte, si ce n’est que ce titre a désormais disparu de la liste de titres présenté dans cette nouvelle vague de l’audit de la REMP. Il va falloir attendre cet automne pour savoir si les quelques 171000 lecteurs de feu L’Hebdo doivent être considérés comme perdus pour la presse magazine ou s’ils se sont répartis sur d’autres titres. Quoi qu’il en soit, qu’un éditeur décide de fermer un titre qui réunisse autant de lecteurs sur le marché romand démontre que l’audience n’est plus le point clé. En regardant le tableau sur la page de droite, on constate que malgré les pertes de lecteurs, la presse écrite romande résiste face à la presse gratuite et au web. L’étude Total Audience, que vous pourrez découvrir en pages XX, confirme que le public ne s’est pas détourné des titres de presse et que la presse écrite, en se transformant en plateformes de contenu, a vu croître ses audiences globales. Et ce au même rythme que les éditeurs transformaient leurs titres en médias multicanaux.

Le nerf de la guerre
Etre lu n’est plus la question centrale pour les éditeurs. Ce qui est par contre vital, c’est d’être acheté par le public et d’être choisi par les annonceurs. Or, la première source de revenu préfère opter pour le tout gratuit et la seconde ne se détourne pas de la presse pour autant que ses tarifs publicitaires s’approchent de ceux pratiqués online.
L’intérêt de cette étude d’audience réside – plus que jamais – dans le calcul des tarifs des coûts par mille contacts (CPM). A l’heure où les annonceurs se sont jetés à corps perdu dans l’achat programmatique, la justification de CPM élevés va se révéler de plus en plus difficile.
Résultat, les tarifs publicitaires sont partout à la baisse, ce qui fragilise toujours plus l’économie de titres qui vivent encore en moyenne à 60% de la publicité. Et force est de constater que la taille du marché suisse, romand comme alémanique, ne peut permettre de rivaliser avec les CPM de Facebook ou de Google.
Bientôt les éditeurs n’auront plus que deux choix : rendre tout leur contenu payant et sortir du modèle publicitaire, ou vendre les données correspondant à leurs audiences. Tamedia, qui vient de réunir tous ces titres sur une place de marché propre, est en train de se profiler sur ce marché de la data. Dans un premier temps, la porte d’entrée restera ouverte aux seules marques de presse mais, pour affiner les profils des lecteurs, il faudra proposer du contenu structuré sur d’autres critères que la région ou le niveau social. Le projet de développer des applications thématiques répond à ce besoin de qualification des audiences. Les éditeurs seront demain des producteurs de contenus à la carte. Dès lors, le mode de diffusion n’aura plus aucune importance, pour autant que le lecteur ait laissé une trace numérique.

Un nouveau modèle est possible
Dans cette perspective, le marché du contenu va devoir se restructurer. Le positionnement des titres va continuer à se segmenter et prendra le pas sur le contenu généraliste. Un regroupement des titres proposant de l’actualité est inévitable. Les magazines ont une petite longueur d’avance, pour autant que leurs communautés soient cohérentes et fidèles. Dans ce contexte, on comprend que L’Hebdo, qui proposait de la politique, de la société et de la culture, segmentait les audiences au lieu de les fédérer. Un important travail de repositionnement va devoir être entrepris.
Et il n’est donc pas étonnant de voir que Le Temps est le titre qui a le plus gagné de lecteurs (+13’000 lecteurs) suivi de Bon à Savoir (+12’000) et de Bilan (+7’000 lecteurs). Dans ces trois cas, le contenu rédactionnel a été repensé, la présence multimédia renforcée. Et dans le cas de Bon à Savoir, l’offre de services a été développée. La chance de ce dernier titre est de pouvoir compter sur un éditeur (Editions Plus Sarl) qui a décidé de se concentrer sur le développement de son titre phare. Bilan peut également compter sur des ressources, mais sera-t-il perçu comme une priorité dans un portefeuille qui compte d’importantes pertes d’audiences (Le Matin Dimanche -47’000* lecteurs, Le Matin – 40’000* lecteurs) ? Quant au Temps, les licenciements qui ont suivi la fermeture de L’Hebdo l’ont fragilisé. Racheté par le groupe Ringier, puis intégré dans la joint-venture Ringier Axel Springer Suisse, il reste un produit à part dans le portefeuille – ce qui relance les rumeurs de sa vente.
Le jeu est plus que jamais ouvert. Les regroupements et les développements sont à venir. On le comprend : le découpage actuel de ce marché n’est plus viable. Comme dans d’autres marchés, si certaines marques de presse vont être amenées à disparaître, d’autres passeront entre les mains d’acteurs économiques qui pourront soutenir ces transformations. Avec le retour de l’investisseur Antoine Hubert, le cas de L’Agefi en est le parfait exemple. Le contenu aura toujours une valeur. Sinon comment expliquer le rachat de titres par les grands opérateurs du Web ?

*pertes significatives

Victoria Marchand

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