«L’idée était de créer une dynamique autour d’un projet mettant en avant notre complémentarité», signale Didier Waldmeyer, diplômé en relations internationales, quand il évoque la société qu’il a co-créée avec Jean-Ephrem Ody (musicien) et Bogdan Nunweiller (réalisateur). A la base du projet, ces derniers voulaient faire un café, mais leur trottait aussi dans la tête de créer une société de production. «Quand ils m’ont proposé de nous associer, tout est allé très vite.»
Philosophie décalée
La première étape aura été la conception d’une identité visuelle, dont le graphisme a été confiée au collectif No-Do, issu de l’écal. Résolument contemporain dans son esthétique, le site Internet contient déjà des perles d’humour : les courts-métrages de Bogdan Nunweiller, accompagnés parfois d’habillages sonores signés Jean-Ephrem Ody. Mauvais Suisse, par exemple, raconte les premiers pas vers les bureaux de vote d’un jeune homme d’origine roumaine complètement largué en politique mais ayant décidé, à 27 ans, d’accomplir son devoir citoyen. «Notre plaquette de présentation était très auto-centrée : nos individualités, nos ambitions, souligne Didier Waldmeyer. Cela nous a permis de réfléchir à ce que nous voulions vraiment faire.» Toujours sur le site, chaque associé a droit à sa petite présentation animée, sur un ton pince-sans-rire: le producteur psychorigide, le musicien contemporain, le Roumain passionné. Sous l’apparence d’une blague potache, les trois compères séduisent par le recul qu’ils prennent sur leurs petits travers. Les influences du trio sur le plan créatif ? «Nous aimons beaucoup la communication d’Apple, qui a su créer quelque chose en tant qu’entreprise et communicateur. Au niveau publicitaire, les pubs de Nike, celles réalisées par Michel Gondry nous ressemblent vraiment, surtout sur le plan de la narration, qui prend parfois certaines libertés avec les codes.»
Clients et réseau
En janvier 07, quelques semaines après sa création, Standard Production reçoit un appel de l’horloger Ventura. «Nous avons été d’emblée sur la même longueur d’ondes. Ils ont compris notre ton, et nous ont confié la réalisation d’un spot pour la foire de Bâle.» Décliné également pour la gare de Bâle, les présentoirs de montres (totems) et le site Internet, ce spot met en scène des danseuses nues incarnant les barres de chiffres numériques. «Notre travail sur le concept a duré trois semaines avec présentation, acceptation, validation puis tournage. Tout cela pour des sommes dérisoires, mais avec au final une excellente carte de visite.» Les choses ont donc accéléré, et une rencontre avec l’agence Tasmanie, par le biais d’une connaissance, permet à Standard Production de signer un spot pour Romandie Max (visible notamment sur le site de com.in). Le concept ? Une démonstration side-by-side, reprise aux lessiviers, contre les «trous budgétaires» dans les plans média. Ceux-ci bénéficient désormais de la formule 3 en 1. Pour la marque Casino, la société a réalisé un spot alliant dynamisme et précision visuelle, transformant les linéaires du magasin en équalizeurs graphiques. Cette idée en a remplacé une autre, que le client a finalement considérée comme un peu trop osée. «Nous avions remarqué que l’enseigne Casino inspirait la France, et avions pensé qu’il pourrait être intéressant de se démarquer du discours classique des autres grands distributeurs, à savoir sur le prix, le choix, etc. Dans le spot prévu, Monsieur Casino devait procéder à sa naturalisation face à trois jurés un peu caricaturaux, en franchissant des épreuves typiques, mais de plus en plus difficiles, le tout se terminant par une lutte à la culotte avec l’un des juges, un colosse de deux mètres de haut.» Ne peut-on plaisanter impunément avec le drapeau ? «Il est certain qu’une telle option comportait une part de risque, même s’il était peut-être plus intéressant sur le plan créatif. Mais nous respectons parfaitement le choix du client.» Le réseau professionnel de Standard Production s’agrandit petit à petit, grâce à de précieux contacts, et notamment chez Publisuisse sur le site duquel la société est à présent référencée. «J’ai rencontré l’un des responsables au Salon de l’auto, donc je me rends compte à quel point les rencontres et le relationnel sont importants. Et l’on s’aperçoit, avec les retours des clients, que nous arrivons à maîtriser à la fois la phase commerciale et la phase de création», souligne Didier Waldmeyer. D’autres ambitions sur le plan du réseau ? «Nous aimerions beaucoup pouvoir développer, comme nous le faisons déjà avec l’agence Tasmanie, des collaborations avec les grandes agences publicitaires, comme Trio, Saatchi, Euro RSCG ou encore Publicis, mais jusqu’à présent, nous n’avons pas réussi à les rencontrer.»
Projets cinématographiques
La société vit actuellement surtout de la création de spots publicitaires. Cependant, elle se définit comme une agence «assez globale» pouvant offrir d’autres types de services : film institutionnel, graphisme, multimédia, photographie et création musicale. «A trois, nous estimons pouvoir couvrir beaucoup de domaines. Et au-dessus de tout ça, il y a aussi l’aspect créatif, dans le sens où l’on vient nous voir pour la réalisation d’un spot publicitaire, mais nous en proposons aussi la conception.» S’il est un domaine que Standard production s’est juré d’investiguer de près un jour ou l’autre, c’est celui du cinéma. «Aujourd’hui, l’on sent que ça bouge véritablement pour le cinéma suisse, en dépit des réticences de certains critiques. Notre ambition serait d’aider un peu les jeunes pousses, comme on l’a déjà fait pour des élèves de l’école d’art de Vevey.» Didier Waldmeyer reconnaît que la Suisse alémanique possède à ce jour une longueur d’avance sur la Suisse romande en terme de financement cinématographique, mais il n’y voit pas une fatalité. La solution ? Ne pas compter que sur les aides de la Confédération en allant chercher de l’argent auprès de grandes marques helvétiques prêtes à s’investir dans un projet qui leur parle. En attendant, Standard Production souhaite continuer à multiplier les expériences. «Nous apprenons beaucoup en faisant des spots, car nous travaillons avec une équipe technique, un projet, un client derrière et surtout une obligation de résultat. Donc tout ce travail nous prépare à quelque chose de plus important. D’ailleurs, nous avons déjà des projets, qui sont actuellement en phase d’écriture.»