Lors d’une création graphique, on ignore souvent qu’il y a noir et noir. Si vous optez pour un aplat de couleur noire, êtes-vous certain qu’après impression votre noir le sera vraiment ? C’est pourquoi il faut choisir certaines formules pour arriver à obtenir un beau noir.
Impression quadrichromie
L’impression en quadrichromie (CMJN) est la méthode privilégiée d’impression ; elle utilise quatre encres de base : cyan, magenta et jaune, qui sont les trois couleurs primaires de la synthèse soustractive, à laquelle s’ajoute, pour des raisons techniques, le noir. En théorie, les trois couleurs primaires, si elles sont mélangées à 100% entre elles, devraient produire du noir, mais en pratique, le résultat d’impression de ce mélange n’est pas suffisamment riche et ne permet pas d’obtenir une échelle de tons complète. Pour cette raison, une quatrième encre, la noire, a été ajoutée afin d’obtenir une impression en couleurs complète.
Impression du noir
La somme de C, M et Y à 100%, devrait donc générer la couleur noire, mais en réalité on obtient une nuance brunâtre. De même, le noir constitué uniquement de N à 100% ne correspond pas à un noir riche, auquel nous sommes habitués visuellement, car celui-ci est précisément « enrichi » par l’ajout d’un pourcentage des trois autres couleurs.
Noir standard (pauvre)
Le noir standard (image 2) est composé de C0, M0, Y0, N100. Ce type de noir doit toujours être utilisé pour les textes, les filets et les petits éléments, en définissant de préférence l’attribut de surimpression. La surimpression est nécessaire pour éviter que des filets blancs n’apparaissent sur les bords des différents éléments en cas de mauvais alignement du papier lors de l’impression. Pour ces éléments, il n’est pas non plus recommandé d’utiliser du noir riche, car en cas de défaut de repérage, ce dernier pourrait entraîner un effet de doublage visuel gênant en raison du désalignement des différentes couleurs. (Image 1)
Mais un noir standard pour des aplats pleins ou des éléments graphiques volumineux n’est pas appropriée, sauf si vous souhaitez reproduire volontairement un noir pauvre. Cet effet pauvre a lieu quand le support, pendant la phase d’impression, absorbe une partie de la couleur appliquée qui apparaît donc estompée et pas suffisamment chargée. Évidemment, le résultat final dépend beaucoup du type de papier utilisé, mais dans la plupart des cas, vous obtenez un gris très foncé et pas toujours uniforme. Pour ces éléments, il convient donc d’utiliser un noir « enrichi ».
Noir riche
Un noir complet et profond est obtenu en combinant les quatre couleurs CMJN selon différents pourcentages. Selon la couleur choisie, il est possible d’obtenir des noirs chauds, froids ou neutres. Il n’y a donc pas de combinaison unique d’encres. Les différents pourcentages de couleur à utiliser varient en fonction de l’effet final souhaité.
Le noir riche (image3) le plus commun et le plus utilisé est composé de: C63, M52, Y51, N100. Cette couleur doit sa popularité au logiciel Photoshop, raison pour laquelle elle est aussi connue sous le nom de Noir de Photoshop. En fait, ces pourcentages sont obtenus lorsque les zones noires d’une image RVB (R0, G0, B0) sont automatiquement converties en couleur (CMJN) à l’aide des paramètres d’usine de Photoshop.
Un noir froid est généralement obtenu en fixant C60, M0, Y0, K100. Une variante plus chaude peut être créée avec les pourcentages suivants : C0, M60, Y30, K100. Le noir neutre, par contre, a des pourcentages variables qui sont généralement choisis en fonction de la technologie d’impression utilisée.
Personnellement, j’utilise et conseille toujours d’utiliser les pourcentages de couleurs suivants pour obtenir un noir riche, profond et uniforme : C40, M30, Y30, K100. Que ce soit pour l’impression offset ou numérique et aussi grand format. Le noir reste ainsi beau et riche et il n’y aura pas de surimpression, puisque le taux d’encrage restera loin de la limite, soit un taux d’encrage de 200%.
Limite d’encre
Ce qu’il est important de savoir aussi, quel que soit votre choix de couleur, est que les différents pourcentages qui constituent l’impression du noir, s’ils sont additionnés, ne doivent pas dépasser 300% de la couverture des encres. Une plus grande couverture donne vie à une impression saturée et trop chargée, de façon à compromettre la qualité du produit final. Aucun support d’impression ne peut contenir toute cette couleur.
En fait, les différentes encres sont appliquées sur la feuille imprimée, superposées selon une disposition spécifique de points de couleur (réglés par les trames d’impression). Les pourcentages définis pour chaque teinte déterminent la taille des différents points. L’encre appliquée doit ensuite sécher. C’est à ce stade que nous rencontrons les premiers problèmes : créer des couleurs (particulièrement sombres) dont le CMJN dépasse 300% peut entraîner différents problèmes en phase d’impression, à la fois lors de l’application des encres et lors de la phase de séchage. Le support imprimé, trop « imbibé » de pigments, pourrait se déchirer, se salir, et poser problème en phase de façonnage.
Il est conseillé pour une impression offset de ne pas dépasser une charge d’encre de 300% pour un papier couché, et une charge de 280% pour les autres papiers.
La seule exception est le noir de repérage, qui est toujours composé de C100, M100, Y100, K100 et donc de 400% de la couverture en encres. Cette couleur est utilisée uniquement pour les marques de repérage, telles que les traits de coupe et les hirondelles, et ne doit jamais être utilisée pour d’autres éléments graphiques.
Affichage vidéo vs. impression
Souvent le noir paraît délavé à la sortie de la presse. Pourtant, sur l’écran, tout était parfait ! Un problème souvent sous-estimé est que tous ces noirs se ressemblent presque sur tous les moniteurs, à l’exception des appareils professionnels calibrés pour un affichage correct des couleurs. En fait, sur les moniteurs communs, ils sont représentés en noir absolu (R0, G0, B0), mais s’ils sont appliqués sur les différents supports d’impression, ils conservent leurs caractéristiques spécifiques. Les couleurs affichées à l’écran ne reflètent pas le résultat final de l’impression.
Conclusion
Lors de la conception de dessins graphiques destinés à l’impression, vous devez d’abord définir la méthode de couleur du document CMJN, après quoi vous devrez prêter une attention particulière aux pourcentages de couleur utilisés pour éviter les problèmes d’impression mentionnés ci-dessus. Si vous ne savez pas quel résultat chromatique convient le mieux à vos besoins, vous pouvez toujours opter pour un test d’impression contenant les différentes couleurs comparées afin de pouvoir choisir celui qui correspond le mieux à vos besoins.
(à gauche : rose ok)
Le fond noir d’une photo
Nos écrans peuvent nous réserver des surprises souvent désagréables. Le fond noir d’une photo peut avoir une composition CMJN légèrement différente du noir de la mise en page numérique. Cette différence pourrait être visible à l’impression de votre photo.
Une astuce pour que l’impression de vos photos reste aussi intense qu’en version numérique. Si vous souhaitez coller vos photos aux fonds noir sur un aplat de noir, il vous faudra faire une petite manipulation pour éviter les différences de tons à l’impression :
Sur Photoshop, utilisez l’outil pipette pour capter la couleur noire de votre photo originale.
Créez cette couleur dans votre palette de couleur.
Modifier la couleur de votre fond avec cette nouvelle couleur (en utilisant InDesgin, il est conseillé de faire très attention à la charge d’encre totale qui s’obtient en additionnant toutes les valeurs primaires)
SIGNATURE : Antonio De Donatis, directeur des ventes, Groupdoc