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Vivre et laisser vivre

Le rachat de Naville n’est que l’un des multiples exemples d’entreprises romandes passées en mains alémaniques. Dans le seul monde des médias, l’absorption d’Edipresse par Tamedia et celle de PubliGroupe par Swisscom, ainsi que l’arrivée de Valora dans l’univers des kiosques romands, nous obligent à dresser deux constats.

Le premier est positif : il prouve la bonne santé de l’économie romande. Bien que minoritaire, cette partie du pays connaît un essor important. Selon le rapport des Banques cantonales romandes, le PIB romand a poursuivi sa hausse au rythme de 2,6% en 2014. Pour l’an prochain, ces mêmes experts prévoient un taux de 3%, alors que la croissance pour toute la Suisse devrait atteindre 2,7% Depuis que ce PIB romand a été calculé (pour la première fois en 2003), l’économie romande a crû plus rapidement que celle du reste du pays. Autre indicateur intéressant, la croissance de la population a également été supérieure dans les cantons de langue française : de 16% depuis l’an 2000 contre 10% en Suisse alémanique. Cet apport en population a eu une influence sur l’équilibre des forces, puisque les Romands représenteront bientôt 25% de la population totale.

Le second constat est négatif : le sens des rachats se fait toujours d’Est en Ouest. Ce sont les entreprises romandes qui passent en mains alémaniques. Or, chaque fois, le centre de décision se déplace d’Ouest en Est. Certes, on laisse en place des responsables locaux mais les vrais décideurs se concentrent à Zurich. Ici, on le regrette puis on s’y résigne : le management ne s’exerce pas de la même manière des deux côtés de la Sarine. Il y a cependant un vrai enjeu : le savoir-faire et la créativité de l’espace francophone risque d’étouffer sous une « Führung » qui ne lui laisserait pas suffisamment d’espace et de souplesse pour que son génie propre puisse s’exercer – celui-ci justement qui a permis cette forte croissance. Si c’était le cas, ce seraient autant les acheteurs que les achetés qui se retrouveraient dans l’embarras.

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