Hausse de tarifs de La Poste : des éditeurs envoient une lettre ouverte à Doris Leuthard
Les petits éditeurs de presse se mobilisent. La Liberté, Le Courrier, La Gruyère, Echo magazine, Gauchebdo, La Cité, Vigousse, Woz, Area, Edito+Klartext, L’Evénement syndical, Le mensuel d’Uniterre, SIT-info, Work, Article 60, Courrier de l’AVIVO, CultureEnJeu, FRC Mieux choisir, La Couleur des jours, Le Monde du travail, Pages de gauche, La Revue Durable, SEPT.info et StopOG ont signé une lettre ouverte à la Conseillère fédérale Doris Leuthard afin de lui faire part de leurs craintes quant aux répercutions qu’entrainera une hausse des tarifs de La Poste.
Lettre ouverte à Doris Leuthard contre la hausse des tarifs postaux
La Poste a mis en oeuvre au début de cette année une augmentation étalée sur trois ans de ses tarifs postaux pour la distribution des journaux et périodiques. Alors même qu’en 2013, La Poste a réalisé un bénéfice net de 626 millions de francs.
Les titres signataires de cet appel dénoncent cette décision unilatérale et considèrent :
· Que la diversité de la presse recule, conséquence de la disparition de nombreux titres
· Que le développement des nouvelles technologies de l’information et de la communication permettent une captation de la publicité qui allait auparavant aux médias et qui se concentre désormais chez des géants de l’informatique ne produisant ni contenu ni valeur-ajoutée, tout en réduisant fortement les moyens financiers des entreprises de presse.
· Que, contrairement à ce qui se passe dans des pays voisins, la presse suisse ne bénéficie d’aucune aide directe, son seul soutien provenant des tarifs réduits pour distribuer les titres auprès des lecteurs. La Poste touche d’ailleurs 50 millions de francs versés par la Confédération au titre de l’aide indirecte à la presse.
Cette progression des tarifs se fait dans l’opacité, La Poste ne pratiquant guère la transparence quant à ses frais de distribution au nom du secret commercial. Elle a toujours refusé de donner le détail de son «compte journaux» tout en déclarant qu’il est déficitaire. Par ailleurs, avec le changement de statut de La Poste, les voies de recours sont devenues floues.
De surcroit, cette décision est injuste car frappant plus fortement les petits tirages. Elle risque de faire disparaître les dernières publications indépendantes de Suisse et de réduire la marge de manoeuvre des grands groupes de médias.
La diversité de la presse, indispensable à la formation d’une opinion publique réfléchie et indépendante, sera lésée. Le champ dans lequel le débat démocratique peut s’exprimer risque de fondre comme neige au soleil. Et les petits tirages comme les jeunes titres et ceux des régions périphériques peineront encore plus à donner de la voix. Il s’agit d’une attaque contre la démocratie semi-directe et d’un nivellement de la pensée.
Pour toutes ces raisons, les titres signataires de cet appel, dont certains ont décidé d’utiliser des voies de droit pour s’opposer à cette décision unilatérale, demandent:
· A La Poste de faire machine arrière et de renoncer à cette augmentation.
· A la Confédération d’intervenir auprès de cette entreprise en majorité en mains publiques pour que les intérêts économiques de la presse ne soient pas bradés. En tant qu’actionnaire majoritaire, elle doit exiger une transparence des comptes. Il n’est pas acceptable qu’une entreprise qui réalise 626 millions de francs de bénéfice en 2013 se montre sourde aux problèmes économiques qu’elle cause.
· Aux différentes autorités cantonales et communales de se mobiliser pour refuser ce diktat.
· Aux partis et aux partenaires sociaux d’inclure dans leurs réflexions la question de la diversité de la presse, problématique ô combien importante dans un pays connaissant des instruments de la démocratie semi-directe.
Les hausses signifiées par La Poste s’étalent sur trois ans. Le Conseil fédéral mène une réflexion sur la question des médias. Mais sur le long terme. Or c’est aujourd’hui qu’il faut agir. Dans trois ans il sera peut-être trop tard.
(Photo : Neil Labrador/L’Evénement syndical)