#CHRONIQUE – Facebook fête ses 20 ans, l’âge de raison ?

Chronique rédigée par Jean Meneveau, Partner chez Colombus Consulting

Si tout le monde garde en tête les déboires de Facebook sur ces dernières années, les démêlés avec avec les autorités et régulateurs et une image vieillissante, et une décroissance sur certains segments, Facebook demeure un géant des réseaux sociaux. Avec plus de 3 milliards d’utilisateurs réguliers à l’échelle mondiale et 2,8 millions rien qu’en Suisse, sa portée demeure incomparable.

Un trésor pour les annonceurs et les marques, qui ont largement basé leurs stratégies publicitaires sur cette énorme audience.

Alors que Facebook peut être considéré, dans une certaine mesure comme ringard (avec un âge moyen des utilisateurs de 32 ans), le groupe Meta a réussi à le hisser au rang de champion incontesté de la rentabilité, lui permettant de rester incontournable au sein de l’écosystème digital mondial.

Depuis son lancement en 2004, le réseau social emblématique créé par Mark Zuckerberg, a redéfini la manière dont le monde interagit en ligne. Avec des fonctionnalités telles que « like » et « share », Facebook a posé les bases des réseaux sociaux modernes, créant une plateforme où les utilisateurs peuvent partager leurs expériences, connecter avec d’autres et participer à un écosystème numérique dynamique.

Mais cette évolution n’a pas été exempte de controverses. Des questions évidentes concernant la protection des données et le non-respect de certaines règles ont été mises en évidence, notamment à travers le scandale impliquant Cambridge Analytica. Cette affaire a révélé des lacunes significatives dans les mécanismes de protection des données de Facebook, soulevant des préoccupations légitimes quant à la confidentialité et à la sécurité des informations des utilisateurs.

Meta semble déterminé à maintenir une position conservatrice pour Facebook. L’introduction prévue du Digital Services Act en Europe va contraindre les géants technologiques, tels que Facebook et les autres GAFAM, à revoir leur approche en matière de gestion du contenu diffusé sur leurs plateformes. Cette réglementation pourrait forcer Meta, ainsi que d’autres entreprises du secteur, à mettre en place des mécanismes plus efficaces pour filtrer et modérer le contenu publié sur leurs plateformes.

Cependant, malgré ces changements réglementaires, Meta semble déterminé à rester en tête de l’industrie. Mark Zuckerberg a récemment annoncé d’importants investissements dans le domaine de l’intelligence artificielle (IA), avec un accent particulier sur l’IA générative. Le modèle phare de Meta dans ce domaine est Llama, une technologie d’IA générative qui promet d’ouvrir de nouvelles possibilités dans la création de contenu. Les investissements massifs dans ce domaine indiquent la volonté de l’entreprise de rester à la pointe de l’innovation, même face à des réglementations plus strictes.

Et dans 20 ans ? On peut imaginer un réseau social dopé et piloté par l’IA générative, moins dépendants des fournisseurs de contenu, car créant son propre contenu, avec une interface réellement personnalisée et individualisée. En quelque sorte, la fin des médias de référence sur les réseaux sociaux, mais la place à un nouveau média qui serait beaucoup plus intime et utilisant toujours les mêmes leviers pour booster l’audience … mais peut être aussi moins vérifiable, et donc bien plus complexe à gérer pour Meta.

Seuls les échanges entre membres resteront « réels » (même s’ils pourront être aussi gavés par l’IA générative), afin de conserver les principes de base d’un « réseau social ».

Bien entendu, cette vision provocatrice est largement possible et sans doute en quelques années seulement. Seules les questions d’éthique et réglementaire restent des remparts à des dérives potentielles et évidentes, et celles-ci devraient occuper l’actualité dans les prochaines années. L’IA act qui vient d’être ratifié de manière historique en Europe s’inscrit dans ce mouvement, mais il s’agit là d’un sujet à part entière … A suivre !