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Marketeur du mois : Yves Durand de Chaplin Museum Development

Il aura fallu près de 16 ans pour que le musée Chaplin devienne une réalité. Co-instigateur du projet, le québécois Yves Durand a imaginé la scénographie des lieux et conçu toute la stratégie marketing. Objectif : trouver la rentabilité après seulement trois ans d’exploitation.

Yves Durand, quelle est la genèse de ce projet ?
Les premiers contacts avec la famille Chaplin ont débuté en 2000. Pendant deux ans, mon associé, l’architecte Philippe Meylan, et moi-même avons commencé à constituer le corpus conceptuel de ce projet avec les enfants de Charlie Chaplin. En 2002, nous avons annoncé publiquement notre intention de créer un musée et avons lancé le processus de concrétisation, soit la réalisation des plans d’architecture et d’urbanisme, la stratégie marketing, etc. Malheureusement la mise à l’enquête a été bloquée pendant quatre ans par l’opposition d’un voisin. Cela a tout reporté à 2008 où il a fallu reposer les autorisations de construire. Le chantier a finalement débuté en 2014 pour finir en 2016.

Combien a coûté la réalisation de ce musée ?
Le budget d’investissement s’est élevé à CHF 60 millions. Ce qui comprend tous les coûts de construction (quelque CHF 32 millions), l’achat du manoir, et l’intégralité des frais de développement.

Quelle est la structure de l’actionnariat ?
La société Chaplin Museum Development s’est associée au consortium Genii Capital pour procéder à l’achat du Manoir de Ban et à la construction du musée. L’exploitation de ce dernier a été confié à la Compagnie des Alpes qui gère notamment le Musée Grévin et une dizaine de parcs d’attraction.

En combien de temps avez-vous prévu d’arriver à la rentabilité ?
Notre étude de marché, qui a été validée par KPMG, table sur un retour sur investissement sur 3 à 5 ans. Je parie toutefois d’arriver à ce résultat en trois ans.

Quid de la fréquentation attendue ?
Notre objectif est d’atteindre les 300 000 visiteurs par an, la fourchette démarrant à 250 000 visiteurs.

Avec de tels chiffres, il est évident que vous visez principalement le marché international.
Oui, deux visiteurs sur trois seront bien évidemment étrangers. Raison pour laquelle nous travaillons en stratégie push avec des intermédiaires comme les tours opérateurs et les grossistes en voyage qui vendent la destination Suisse de par le monde. Notre but est d’attirer les touristes qui se rendent à Berne ou Genève et qui, sans ce musée, n’auraient jamais eu l’idée de venir à Montreux.

Vous tablez sur un effet d’attraction du nom Chaplin ?
Oui, notre objectif est de combiner une dynamique de rétention de clientèle de passage avec les fans de Chaplin Chaplin qui viendront faire le voyage dans ce seul but. Cela nous pousse à travailler étroitement avec Swiss Tourism afin d’être présents dans des salons professionnels et des road shows de promotion sur la Suisse qui se tiennent à l’international.

La Suisse est un pays cher, où il est difficile d’attirer un tourisme de masse. Qui visez-vous ?
Il est clair que votre pays n’est pas accessible à tous les pouvoirs d’achat. Les touristes qui y séjournent font partie d’une clientèle relativement aisée qui est aussi exigeante dans ses loisirs que dans sa vie professionnelle ou personnelle. Raison pour laquelle nous avons tenu à ce que la muséographie soit irréprochable. Par exemple, tous les jours les statues en cire sont nettoyées et remises en état. Le visiteur s’attend à cette qualité suisse !

Mis à part le fait que la dernière demeure de la famille Chaplin se trouve sur les hauts de Vevey, n’aurait-il pas été commercialement plus rentable de créer ce musée dans un autre pays ? Charlie Chaplin est notamment né à Londres…
Non, car Chaplin’s World est un lieu double, comprenant un musée retraçant la carrière de Charlot et le manoir de Ban permettant de resituer l’artiste dans les dernières années de sa vie. Cette maison est essentielle pour comprendre ses relations familiales et découvrir les nombreuses personnalités qui sont venues rendre visite à Chaplin en Suisse. Nous n’avons pas voulu en faire un parc d’attraction, ni de recueillement ; l’idée est de contextualiser et d’ancrer une œuvre universelle. Mais que l’on se rassure : disposer de ce patrimoine immobilier ne nous empêchera pas de voyager.

Comment allez-vous rendre le musée itinérant ?
Par le biais d’expositions thématiques qui voyageront tout au long de l’année. La Compagnie des Alpes dispose des droits d’utilisation des marques « Charlie Chaplin » et « Chaplin’s World ». Elle va pouvoir procéder à des développements dans les domaines de la muséographie et commercialiser des produits dérivés. Par ailleurs la famille dispose d’un fonds qui comprend les droits des films et images. Elle est propriétaire d’objets uniques qui font partie d’une collection en partie présente dans le musée. Nous disposons par conséquent de suffisamment de contenu pour pouvoir organiser des expositions dans différents pays.

Charlot est un personnage du début du XXe siècle. Est-il connu dans les nouveaux marchés que sont la Chine ou la Russie ?
De par leur critique du monde moderne, les films de Charlot ont été régulièrement montrés par-delà le rideau de fer car ils servent à montrer les travers du monde capitaliste. L’image du vagabond est vraiment universelle. Il suffit de voir l’adhésion des enfants lorsqu’ils découvrent ses films. Charlie Chaplin était un clown ou un mime qui n’a fait que raconter la condition humaine au travers de films pour la plupart muets. On ne saurait être plus moderne !

www.chaplinsworld.com

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