#Interview – Accès gratuit au site du Temps : un geste stratégique selon Pierre-Adrian Irlé

Du 10 au 13 avril, le site LeTemps.ch sera en libre accès. Une opération marketing à fort impact, qui méritait quelques éclaircissements. Cominmag s’est donc entretenu avec Pierre-Adrian Irlé, directeur exécutif du Temps, pour en décrypter les enjeux stratégiques.
Il y a deux jours, la REMP publiait les résultats de l’étude Mach Basic sur les audiences de la presse écrite. Comme nombre de titres payants, Le Temps enregistre un recul : l’étude 2025-1 fait état de 82 000 lecteurs, contre 107 000 selon les données 2021-2. Cette opération de gratuité est-elle une réponse à cette baisse ?
Pas du tout. Cette initiative, qui concerne uniquement l’accès au site et non aux abonnements papier, a été planifiée bien en amont. Sa coïncidence avec la publication de ces chiffres est purement fortuite.
Dans le même temps, la REMP a publié les résultats de l’étude Total Audience, qui agrège les audiences print et digitales. Pourquoi Le Temps n’y figure-t-il pas ?
Nous connaissons parfaitement nos audiences digitales grâce à nos propres outils de mesure. En revanche, nous ne disposons pas des ressources nécessaires pour financer des enquêtes nous permettant d’estimer l’audience de notre version imprimée au-delà du nombre d’abonnés. C’est la raison pour laquelle nous nous limitons à l’étude Mach Basic.
Quel est l’objectif de cette opération « 4 jours gratuits » ?
Il s’agit de permettre à un public encore hésitant face à l’abonnement numérique de découvrir notre univers éditorial. C’est une démarche gratuite, mais qui s’accompagne d’une forme de réciprocité : les internautes devront s’enregistrer pour en bénéficier. L’idée est d’instaurer un parcours utilisateur intermédiaire qui nous permette de nouer un premier lien avec une audience potentielle que nous ne parvenons pas encore à identifier.
Ce principe de « login contre accès » rappelle les pratiques de Play Suisse, plateforme que vous avez dirigée. Est-ce un modèle que vous transposez ?
Tout à fait. Le public comprend aujourd’hui qu’un accès gratuit implique un certain engagement. Ce mécanisme avait très bien fonctionné avec Play Suisse, et je suis convaincu que le taux d’acceptation sera tout aussi satisfaisant pour Le Temps.
D’un point de vue marketing, ce sont surtout des lecteurs print que vous perdez. Des actions sont-elles prévues pour relancer la diffusion papier ?
Oui. Nous allons bientôt lancer des actions de visibilité dans les cafés et restaurants. Il faut reconnaître que les journaux papier ont déserté l’espace public. Nous souhaitons les y réinstaller. Il existe toute une génération qui n’a jamais eu un quotidien entre les mains. C’est un geste symbolique, mais nécessaire, pour renouer avec une présence tangible dans la vie quotidienne.