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ENQUETE COMINMAG – Quelle place pour les femmes dans les agences de pub en Suisse romande ? 4 directrices d’agences donnent leur avis

Qu’en est-il de la situation des femmes au sein des agences de communication  ? Le mouvement #MeToo qui a atteint les médias agite actuellement fortement le microcosme alémanique. En va-t-il de même dans le monde de la pub ?  Cominmag donne la parole à 4 directrices d’agences qui ont créé ou qui sont à la tête de leur structure. Elles proviennent de différents cantons, elles ont des expériences professionnelles différentes.

 

Léa Budaudi, co-fondatrice et directrice de l’agence Minuit Une à Lausanne

Avant de co-créer votre agence, vous avez travaillé en agence. Quelle a été votre expérience ?
J’ai eu la chance d’avoir été valorisée pour mes compétences. J’ai pu grandir grâce à un mentorat bienveillant. Je n’ai pas eu à me battre pour trouver ma place.

Avoir de la chance cela signifie-t-il que vous êtes une exception ?
Non, mais la culture de cette agence m’a permis d’apprendre et d’avoir envie de créer ma propre structure. C’est certainement plus difficile dans les grandes agences.

Aviez-vous dès le départ le projet de créer votre structure ?
Ce n’était pas ma première motivation mais étant formée en études de genre, j’ai cherché une agence spécialisée dans cette thématique. Ne la trouvant pas, j’en ai conclu qu’il était temps que quelqu’un se lance. J’ai pris ce risque avec deux autres associés.

Le monde des agences a connu une division du travail très claire entre les hommes et les femmes. Est-ce encore vrai ?
Si vous vous référez à l’homme créatif et à la femme account, c’est une réalité mais pas une fatalité. Cette segmentation semble également induire une hiérarchie entre les postes visibles et ceux de l’ombre. C’est ce biais qui doit évoluer. Le poste de responsable de clientèle est aussi important et équivalent à celui de DA ou DC.

Une carrière en agence est-elle plus courte pour une femme que pour un homme ?
J’ai souvent entendu qu’après 35 ans, une femme n’a plus sa place dans une agence. La période de la maternité amène bien des femmes à privilégier des postes chez l’annonceur qui sont plus compatibles avec une vie de famille. Avec le développement du télétravail, les cultures sont en train de changer mais il reste certain que travailler en agence demande une plus grande souplesse.

Alors que tous les secteurs ont connu leur #MeToo pourquoi on n’entend rien du côté des agences ?
Le paysage est constitué de petites et moyennes structures dont souvent le RH est le fondateur ou le directeur. Vers qui peut-on se tourner si on est confrontée à un problème ? Le marché est tellement petit que lorsque l’on est harcelée ou dénigrée, la seule solution est de partir.

Anaïs Baud, co-fondatrice et directrice de l’agence Ma Régie à Bienne

Votre profil est commercial et votre associé est le directeur de création : une répartition des rôles très stéréotypée ? 
Une réalité. Je commencé dans la commercialisation d’espace, prendre en charge le « new business » dans mon agence était quelque chose qui me convenait. Je n’allais pas m’associer avec quelqu’un qui avait les mêmes aptitudes. Nos rôles étaient compatibles, c’est tout.

Avez-vous été confrontée à des situations difficiles en raison de votre genre ?
Mon âge m’a posé plus de problèmes. Pour certains, être compétent et jeune cela ne pas de pair. Quant au fait que je sois une femme, il est vrai que j’ai vécu des situations cocasses. Il est souvent arrivé qu’en arrivant à un rendez-vous avec mon associé, on me prenne pour son assistante. Mais c’était plutôt maladroit qu’intentionnel.

 

Valérie Pecalvel, co-fondatrice et directrice de l’agence Franz&René à Berne

Peut- on encore parler de postes genrés dans la publicité ? 
De moins en moins. Si je me réfère aux postulations que je reçois actuellement, il y a autant de femmes que d’hommes qui souhaitent être graphistes ou account. Les choses changent.

Toute structure a ses biais lors du recrutement. Quels sont ceux chez Franz&René ? 
Etant basé à Berne, l’équilibre entre les cultures francophone et alémanique est crucial.

Une jeune femme de 35 ans aura-t-elle toutes ses chances ?
Evidemment dans notre équipe nous avons eu des enfants et nous comprenons la situation. Nous sommes un team senior pour qui la fidélité de ses collaborateurs passe par la compréhension des étapes de vie de chacun.

Le monde des agences en Suisse romande semble préservé des critiques #MeToo, pourquoi ? 
En raison de la taille du marché. D’une part, les structures sont petites et on y est engagé pour une fonction bien précise. Il n’y a de place pour des jeux de pouvoir internes comme il n’y a pas non plus un choix infini d’employeurs. Si vous n’arrivez pas à vous intégrer où si vous ne vous entendez pas avec vos collègues, la seule solution c’est de partir. Ce pose alors le choix de partir chez l’annonceur ou de créer sa propre agence.

Caroline Muller, co-fondatrice et directrice de l’agence MAP à Cossonay

Les petites structures sont-elles plus sujettes au management toxique ? 
C’est le contraire. J’ai commencé ma carrière dans une multinationale et je peux vous assurer qu’une agence à taille humaine ne permet pas de tels dysfonctionnements. On ne peut se permettre d’avoir des collaborateurs qui ne s’entendent pas.

Que la fonction de RH soit généralement exercée par la direction de l’agence est-ce un plus ou un moins pour les collaborateurs ?
Disposer d’un RH ne résout aucun problème, car de toutes les manières cette fonction est liée à la direction. Concrètement si un collaborateur n’arrive pas à s’intégrer, que l’on ai un RH ou pas, on ne pourra lui fournir un autre poste. C’est la différence avec une grande structure qui peut chercher une solution interne qui convienne le mieux à tout le monde.

L’horizontalité des agences prémunit-elle contre les cas de harcèlement ?
Contrairement au fonctionnement d’une rédaction qui est très vertical, le travail en agence est très collectif. De plus, on travaille généralement en équipe et dans des open spaces.  En tant que directrice, ma problématique aujourd’hui, c’est plutôt de recréer une culture d’entreprise forte après ces deux ans de Covid et la généralisation du Home Office.

Victoria Marchand

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