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Emphase : Le plaisir du papier et du travail bien fait

Installée à la Rue de Bourg, à Lausanne, Emphase est une agence de communication visuelle spécialisée dans le print et le design d’information. Un domaine encore méconnu en Suisse, qui offre une alternative aux cartes, graphiques et autres diagrammes standardisés.

C’est à la Haute école d’art et de design (HEAD) que se sont rencontrés Fabienne Kilchör et Sébastien Fasel. L’une y était assistante, l’autre encore étudiant. Ils travaillent un temps comme graphistes indépendants au sein du collectif « La Fonderie », à Carouge. En 2010, ils fondent Emphase Sàrl et s’installent à Lausanne.

Passion des livres
Les deux fondateurs démontrent que l’on peut être jeune et préférer le papier aux supports électroniques. Et de rappeler le plaisir simple de s’asseoir avec un dictionnaire, d’en tourner les pages, d’y trouver des informations intéressantes que l’on n’aurait pas forcément su où chercher.
« Il m’arrive souvent d’annoter les livres, ou de découper un article que j’ai envie de garder. C’est une présence, un contact avec la matière, un temps de réflexion. Et le fait de pouvoir souligner aide aussi à mieux comprendre le contenu », relève Fabienne Kilchör. Sur le bureau, trois gros livres gris, rangés dans une boite cartonnée. Il s’agit d’un travail réalisé pour l’Association Palafittes (Office fédéral de la culture), qui recense les dossiers de candidature à l’UNESCO des cent onze villages palafittes considérés comme les plus remarquables, parmi les quelques mille sites connus dans les six pays touchant aux Alpes que sont la Suisse, l’Autriche, la France, l’Allemagne, l’Italie et la Slovénie. Une conception graphique gérée par Emphase de A à Z, sur la base de données brutes et de réunions de travail. Trois concepts sont présentés au client, dont les besoins effectifs conditionneront tout le processus créatif, du design de la boite à l’adaptation de la présentation au contenu et au format du livre. Jusqu’au choix de la typographie (Adrian Frutiger), qui devait dans ce cas-là s’adapter à certains noms slovènes, par exemple, écrits avec des caractères spéciaux.

Visualisation de contenus
Le design d’information est un domaine du graphisme à part entière. « L’information qu’il s’agit de représenter est souvent abstraite, lorsqu’il s’agit de données quantitatives (historiogrammes, camemberts, etc.), mais elle peut également être figurative si on imagine, par exemple, un schéma décrivant la chaine de distribution d’un supermarché », précise Sébastien Fasel. Quand le duo travaille sur une infographie pour un journal, il devra veiller à livrer une image qui soit en adéquation avec sa charte graphique spécifique. « Dans un souci de faire coïncider le fond et la forme, nous lisons toujours attentivement le contenu à mettre en pages. » Un gros travail, donc. Pour une infographie, il faut compter une journée ou deux entre la réception des données à transformer, l’analyse et les discussions étroites avec les journalistes. Par la nature des mandats réalisés à ce jour, le duo peut se prévaloir d’une certaine expertise dans le domaine du patrimoine (notamment archéologie et histoire), ce qui attire régulièrement de nouveaux clients. Mais tout reste ouvert, et l’envie de réaliser des beaux livres prédomine, du rapport annuel d’entreprise au dictionnaire, en passant par des ouvrages qui seraient vendus en librairie et contribueraient à une reconnaissance par un public plus vaste. « Tous les contenus nous intéressent. Nous voulons que le résultat soit lisible et cohérent. Juste par rapport au contenu. « Form follows function » et « less is more » sont nos maximes. » Dès lors, rien ne s’oppose à une participation au concours des plus beaux livres suisses avec un rapport annuel.

La bonne triangulation
Avec un pied dans l’enseignement, un autre dans la recherche et un troisième dans la réalisation de mandats (clients institutionnels et privés), Emphase a trouvé le fonctionnement qui lui convient. A cela s’ajoute la chance de pouvoir travailler des deux côtés de la frontière linguistique, entre la HEAD de Genève, où le duo enseigne le design d’information et la conception de portfolios, et la Haute Ecole des Arts de Berne pour des projets de recherche en design et communication (domaine « Knowledge Vizualisation »), notamment sur la visualisation de la douleur ou d’une archive d’objets hétéroclites. L’avenir ? « Rester dans le print, en travaillant pour des clients qui apprécient la qualité. » L’envie, aussi, de développer des projets plus personnels. Des livres, bien sûr. « Nous en réalisons un actuellement pour montrer à nos clients potentiels que l’infographie et la mise en pages, quand elles vont ensemble, contribuent à créer un environnement plus cohérent. » Et pourquoi pas, un jour, maîtriser l’ensemble du processus en s’occupant d’un journal ou d’un magazine ? Une manière d’atteindre ce qui reste l’objectif du design d’information et du graphisme en général : l’intégration naturelle des contenus, la simplicité.

Gauthier Huber

Huber Gauthier

Journaliste culturel, écrit notamment pour le Kunst-Bulletin et Artpresss

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