2016, bon millésime pour Tamedia
Le chiffre d’affaires a reculé de 5,5%, l’excédent brut d’exploitation et le résultat d’exploitation ont respectivement baissé de 17,5 et 13,1%, le bénéfice ayant même chuté de 63,4% – tels sont, chez Tamedia, les indicateurs de l’exercice 2016. Et pourtant, ni Pietro Supino (éditeur de Tamedia), ni son CEO Christoph Tonini n’avaient l’air déconfit lors de la conférence de presse de bilan.
« 2016 aura été une année difficile, mais à mon avis, l’exercice se solde quand même par de bons résultats », a déclaré Pietro Supino. Et Christoph Tonini d’ajouter : « Nous sommes satisfaits sur le fond, même si le recul de 13% de l’excédent brut d’exploitation est bien entendu décevant ». Raison de ce climat positif : ces baisses parfois assez sensibles sont également dues à des effets exceptionnels. Il faut en effet tenir compte du bénéfice exceptionnel réalisé par Tamedia en 2015 et résultant de la fusion des portails de recherche search.ch et local.ch sous l’égide de Swisscom – un poste qui n’existe plus en 2016. De plus, le chiffre d’affaires de la société Ziegler Druck AG, qui a fermé ses portes en 2015, n’apparaît plus dans le bilan 2016. Ensuite, divers changements comptables relatifs à la caisse de pensions ont entraîné une différence de 36 millions de francs. Et il faut également prendre en compte les 11 millions de réajustement de valeur affectés au danois Trendsales suite à un cas de fraude. « Il suffit de soustraire tous les effets exceptionnels pour retrouver approximativement le niveau de l’année de référence », a précisé M. Tonini pour corriger l’analyse de la situation.
Il n’a toutefois pas omis de signaler que les ventes du marché publicitaire de la presse imprimée ont chuté de 11%, évoquant même l’annus horribilis qui a également affecté Tamedia, notamment dans le segment des Publications régionales dont le chiffre d’affaires a baissé de 9% (- 49 millions de francs), en partie à cause de Ziegler Druck. Mais seulement en partie… s’y ajoute le fait que les recettes publicitaires du numérique n’ont pas permis de compenser les pertes essuyées par la presse imprimée. Des mesures ont donc été nécessaires en termes de coûts, dont la coopération rédactionnelle engagée entre 24 Heures et La Tribune de Genève.
Pour M. Tonini, la vente d’abonnements aux journaux numériques est décevante. Même si tous les titres Tamedia ont désormais leurs modèles de lecture numérique payante, le nombre d’abonnements numériques payants n’a augmenté en 2016 que de 25% (à 25 000, soit 5% de l’ensemble des abonnements à la presse régionale chez Tamedia), le volume d’éditions électroniques vendues s’étant juste stabilisé à 2 000-3 000 unités. Et M. Tonini de revendiquer : « C’est insuffisant et il nous faut multiplier ces chiffres par deux – d’un an sur l’autre. ». Le personnel chargé de vendre les abonnements numériques a donc été étoffé.
Lancé à l’automne, le Matin soir semble quant à lui ne pas avoir réussi sa percée. Interrogé par Cominmag, M. Tonini a qualifié la demande de « très modeste ». Même s’il est encore trop tôt pour formuler un jugement définitif, il pense que ce projet doit être classé dans la rubrique trial and error.
Dans le segment des Publications nationales, le recul du chiffre d’affaires a été plus modéré : -6 % ou 8 millions de francs. Mais les différences sont ici assez fortes. SonntagsZeitung par exemple présente d’excellents résultats (notamment grâce aux diverses coopérations) et a clairement mieux fait qu’en 2015. Contrairement au Matin Dimanche : alors qu’en 2016, la presse dominicale a globalement perdu 21% de ses recettes publicitaires, le déficit a été, toujours selon M. Tonini, « nettement plus élevé » pour le Sonntagsblatt romand, et ce pour des raisons structurelles : dans cette région, la lecture numérique a fortement augmenté le dimanche par rapport à 2015. Interrogé au sujet de la rentabilité globale des titres de Tamedia en Suisse romande, M. Supino a répondu en manifestant un léger étonnement : « La Suisse romande est pour nous une région essentielle. » Même sans vouloir communiquer les chiffres respectifs, la Suisse romande s’avère une région très intéressante, en particulier la région de l’arc lémanique, où Tamedia est active. « Nous sommes très satisfaits de la rentabilité des activités en Suisse romande ».
Le segment du Numérique a de son côté évolué de façon tout à fait différente : grimpant de 3% à 228 millions de francs, il se taille la part du lion avec 85 millions (+21 %) au niveau de l’excédent brut d’exploitation. Comme précédemment mentionné, le seul bémol est causé par Trendsales : « Sans le réajustement de valeur qui a été nécessaire, la croissance du numérique aurait été encore plus forte », a déclaré M. Tonini. Autre point positif : le crédit contracté par Tamedia pour l’achat de ricardo.ch devrait être entièrement remboursé d’ici la fin 2017.
Tamedia mise sur une très forte croissance de la fréquentation dans le secteur vidéo. Même si 15 millions de consultations sont enregistrées chaque mois, ce volume est « bien trop insuffisant » et devra être multiplié par deux en 2017. Souhaitant optimiser la rémunération des efforts entrepris, une coopération a été engagée dans ce domaine avec Goldbach « parce que nos équipes ne sont pas encore suffisamment positionnées dans la commercialisation de vidéos », a expliqué M. Tonini. Enfin, à la question d’un journaliste demandant s’il fallait s’attendre à un second ‘Admeira’, M. Tonini a répondu par un « non » sans équivoque.
Un ROI positif dans le numérique et des visées sur les CFF
Après les gros investissements dans le numérique, Tamedia s’est concentrée en 2016 sur la consolidation. Si l’on fait le total de tous les investissements dans les rubriques numériques et les autres plate-formes non rédactionnelles, et que l’on compare ce montant avec les profits et pertes, qu’en est-il du retour sur investissement (ROI) actuel ? Ni M. Tonini, ni M. Supino n’ont pu répondre explicitement à cette question, l’éditeur se contentant d’évoquer « des résultats positifs ».
Actuellement les CFF ont lancé un appel d’offres divisé en plusieurs lots pour l’ensemble de sa publicité extérieure, analogique comme numérique, l’un de ces lots comprenant aussi la commercialisation du site sbb.ch. Est-ce que Tamedia participera à cette publicité extérieure ? « Nous sommes en train d’étudier cette possibilité, mais aucune décision n’a été prise », a indiqué M. Tonini à Cominmag. Si tel était le cas, cela reviendrait à se lancer dans un nouveau type de commercialisation – une activité que Tamedia n’a exercée jusqu’alors que sporadiquement. De toute façon, seules les formes de publicité numérique des CFF intéresseraient alors Tamedia. L’objectif d’une offre éventuelle – isolée ou en partenariat – serait finalement l’élargissement ou l’approfondissement de l’audience de Tamedia Advertising.[/ASIDE]