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Interview d’Etienne Francey : En quoi une campagne référendaire est-elle si particulière ?

Etienne Francey, fondateur de l’agence Etienne Etienne a eu l’occasion de signer plusieurs campagnes politiques tant pour des élections que dans le cadre d’initiatives. La prochaine votation en Ville de Genève à propos de l’initiative « Zero Pub » est une belle occasion pour qu’il partage son expérience. Il est important de préciser que bien qu’interviewé dans le cadre de cette campagne, il n’a pas réalisé les visuels de celle-ci.

Etienne Francey, quelle est la particularité de ce type de campagne pour un créatif ? 
Il faut trouver le point saillant de l’argumentaire. Pour que cela soit impactant, cet argument ne doit forcément être le plus logique.

Qu’est-ce à dire ? 
On ne doit pas toucher ceux qui sont pour ou contre. Ces deux groupes sont des convaincus et une seule campagne ne suffira pas à leur faire changer d’avis. Le but est de parler à au plus grand groupe : les indécis ou les non-concernés. Autrement dit, le grand public qui n’est apparement pas concerné. Les arguments qui seront mis en avant seront utilisé par le comité référendaire et pourront également être exploités par les partis politiques concernés qui, eux, pourront les reformuler pour leurs électeurs.

On doit être percutant mais pas trop segmentant… pas évident ?
En fait, il faut réussir à associer des idées apparemment sans lien pour frapper les esprits. Dans le cas présent, rappeler que 10 millions cela représente 331 places de crèches, c’est très fort. Les électeurs peuvent mieux se représenter ce que représenterait la fin de l’affichage commercial sur le territoire du domaine public de la Ville de Genève.

Pourquoi les affiches de ce type de campagne sont rarement esthétiques ? 
Parce que cela ne fait pas partie du code. L’esthétisme est du ressort des campagnes commerciales. Une campagne politique se doit d’être minimaliste sinon cela donnerait à penser que le comité référendaire est trop riche.

Miser que sur du texte : plus facile ? 
Non car on en revient toujours à l’argument choc qui va toucher les indécis. C’est le choc des mots et pas des photos !

Ce type de mandat pour une agence c’est secret ou une carte de visite ? 
Ni l’un ni l’autre. Tout dépend du positionnement de l’agence et des responsables. Il en va de même pour les campagnes pour les élections.

Revenons à cette initiative dite « Zéro Pub » : il s’agit d’une fausse promesse !
Absolument. Vouloir enlever la publicité commerciale de l’espace public pour ne laisser que des messages publics ou culturels me semble propre d’un état totalitaire. D’un côté, on vous donne des injonctions de qu’il faut ou ne pas faire et de l’autre on pousse des spectacles qui sont subventionnés. Où est le libre marché ? Le public doit pouvoir se faire son propre avis et l’affichage reste un support local au coût abordable même pour des PME.

Vous oubliez les affiches politiques ! 
Cette catégorie n’est pas concernée par l’initiative et c’est justement la preuve que l’affiche est un des médiums local et que les partis l’ont bien compris. Mais ces différenciations entre le commercial, le culturel, le politique, etc créent des distorsions de marché. Par exemple, un événement sportif contenant le nom d’un sponsors ne sera pas considéré comme commercial et l’affiche pourra présenter les marques de tous ceux qui le soutienne. Et on ne parle pas des spectacles de musique : sont-ils commerciaux ou culturels ? On le voit, cette initiative ne résout rien et ouvre la porte à bien des recours !

A votre avis, comment concilier ceux qui veulent vivre dans un environnement avec moins de pub avec les impératifs financiers des communes ? 
Je trouve que l’approche de la Ville de Lausanne est très juste. Tout en étant critique envers une société de surconsommation, on comprend que l’affichage est aussi une source de revenus. Les marques comme les agences s’adaptent à l’air du temps. L’austérité, l’urgence climatique, l’envie de consommer autrement ont été intégré par les agences, les messages changent. La publicité n’est une photographie de l’air du temps. Certains pourront y voir de l’opportunisme, là où d’autres y verront une nécessité économique. De même que tout est lié dans la nature, une société ne peux se passer d’échanges. Et à moins de revenir au troc, pour vendre sa production, il faut communiquer.

Victoria Marchand

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