La Commission fédérale des médias propose des pistes pour créer une aide à tous les médias indépendamment leur mode de diffusion
Au vu de la forte évolution des réalités de production, de distribution et d’utilisation des médias dans un monde numérique, la Commission fédérale des médias (COFEM) estime que l’aide aux médias axée sur la technologie et les catégories de médias n’a plus d’avenir. En accord avec ses précédents avis, mais en mettant clairement l’accent sur ce point, la COFEM recommande donc un changement de système. Elle a publié à ce sujet le rapport « Avenir de l’aide aux médias en Suisse »
A l’avenir, tous les médias privés devraient pouvoir bénéficier d’une aide, quel que soit leur canal de distribution ou leur catégorie, pour autant que leurs contenus journalistiques s’adressent à un large public et qu’ils s’engagent volontairement Ainsi, toutes les offres journalistiques privées bénéficieraient du même traitement qu’elles soient imprimées, diffusées en streaming ou distribuées sous forme de texte, vidéo ou audio. La réduction des tarifs postaux pratiquée actuellement pour la distribution matinale de certains journaux ainsi que la quote-part de la redevance pour certaines radios ou télévisions seraient remplacées par le nouveau système.
Placer l’utilisation au centre
« Nous sommes convaincus qu’en Suisse, compte tenu de la situation économique difficile, en particulier pour les médias régionaux et locaux, il est nécessaire de soutenir par des fonds publics non seulement la SSR, mais également les fournisseurs de contenu journalistique privés », déclare la présidente de la Commission Anna Jobin. Ces derniers devraient toutefois pouvoir décider librement comment ils entendent fournir leurs contenus à la population. L’aide a pour objectif de mettre à disposition le plus largement possible des informations pertinentes pour la démocratie, peu importe sous quelle forme. La COFEM place ainsi l’utilisation au centre de ses réflexions
La Commission voit concrètement trois domaines dans lesquels cette approche d’aide peut être appliquée: premièrement, dans le cadre de mesures générales visant à renforcer la branche; deuxièmement, dans le cadre du soutien à la fourniture d’offres journalistiques privées et notamment régionales; et troisièmement, dans le cadre du soutien à des projets d’offres journalistiques privées tels que des startups locales et des projets d’innovation de médias. Par ailleurs, la Commission se prononce en faveur d’un service public national indépendant, soutenu par des fonds publics et chargé de fournir un mandat de prestations convergentes en contrepartie du financement par la redevance des médias.
Garantir une allocation indépendante de l’Etat
« Il va de soi qu’un tel changement de système ne peut pas se faire du jour au lendemain et qu’il nécessite des adaptations du droit. De plus, des mesures transitoires sont nécessaires pour les médias qui bénéficient déjà d’une aide », explique Anna Jobin. Le montant des subventions doit également faire l’objet de négociations politiques.
La COFEM réitère toutefois sa demande d’une aide aux médias impérativement conçue en dehors de l’Etat et d’exclure toute possibilités d’influence politique sur les décisions éditoriales. Le changement de système proposé serait donc aussi l’occasion de confier la responsabilité de l’attribution des aides à un organisme aussi indépendant que possible des influences politiques, comme une fondation, une autorité de régulation des médias indépendante de l’Etat ou un comité consultatif.
La réponse de l’association Schweizer Medien (VSM) à ces propositions
L’association des éditeurs se montre sceptique face à ces propositions. Au lieu de remplacer l’aide indirecte à la presse qui a fait ses preuves. Par contre certaines mesures et réflexions de la COFEM correspondent bien aux besoins de la branche des médias et sont soutenues en conséquence. VSM soutient pleinement les mesures interprofessionnelles visant à renforcer la place médiatique suisse, comme par exemple la promotion de la formation des journalistes, de l’agence de presse ou du Conseil de la presse.
Du point de vue du VSM, le remplacement de l’aide indirecte à la presse et du financement des stations de radio et de télévision privées mettrait en danger l’approvisionnement en informations dans les régions. Les solutions présentées par le rapport sont encore floues sur de nombreux points et impliquent une série de questions complexes dont la réponse prendra des années.
Mais les entreprises de médias ont besoin dès à présent d’un soutien renforcé pour assurer la desserte médiatique de base actuelle dans toutes les régions. Le VSM demande une extension de l’aide indirecte à la presse pour les trois raisons suivantes :
- l’aide indirecte à la presse a fait ses preuves depuis plus de 150 ans et aide les entreprises de médias de manière efficace et ciblée. Une extension des aides actuelles peut être mise en œuvre rapidement et sans bureaucratie et apporte un soutien immédiat pour assurer l’approvisionnement journalistique de base en Suisse.
- l’aide aux médias imprimés répond bien à un besoin des utilisateurs : en Suisse, de très nombreuses personnes lisent encore une édition imprimée, qu’il s’agisse d’un quotidien, d’un hebdomadaire local ou d’un magazine. L’encouragement profite donc aussi en premier lieu aux lecteurs.
- grâce à la réduction des coûts de distribution, il est possible d’investir davantage de ressources financières dans la numérisation. L’aide indirecte à la presse aide également les entreprises de médias à faire avancer la transformation numérique.
Du point de vue de l’ASM, l’aide indirecte à la presse est d’une importance capitale pour le maintien à long terme de la diversité et de la qualité des médias en Suisse, également dans les années à venir.