L’innovation continue ou la Beta perpétuelle
Un produit ou un service ne sont-il pas une sorte de version beta perpétuelle, toujours perfectible ? Entre tester en temps réel un produit en optimisant ses fonctionnalités essentielles et développer théoriquement un produit parfait, que choisissez-vous?
Pour Eric Ries, chantre du mouvement et auteur de Lean Startup – à la base d’une méthodologie issue de l’agile development, du lean manufacturing et du customer development -, l’innovation continue ne concerne pas uniquement les startups ou les nouvelles technologies, mais également un champ d’action bien plus large: gouvernements, banques, Telco, distribution, pharma, etc. Ces secteurs doivent eux aussi continuellement adapter leurs idées et prendre en compte les contraintes et évolutions liées aux marchés, aux attentes et aux besoins des consommateurs. Et quand je parle d’adaptation, il ne s’agit pas de tester frénétiquement et de sauter d’une chose à l’autre de manière chaotique, mais bien de construire une connaissance continue du produit et du consommateur dans l’optique de ce que Ries appelle un « Product-Market Fit ». Dans l’innovation continue, ce point de correspondance doit impérativement se produire afin de permettre de poursuivre le développement. S’il n’arrive pas, il faudra alors se résigner à « pivoter » en utilisant la connaissance acquise jusque là pour réorienter son business model ou son produit ou s’adresser à un public légèrement différent.
The most powerful brand experiences and connections begin with the product.
– Alex Bogusky
L’innovation continue nous enseigne que travailler de manière agile et itérative, en testant sans relâche une hypothèse, est une nécessité. Eric Ries le résume par ce slogan : « Get out of the building » ; autrement dit : finies les hypothèses confondues avec des certitudes parce qu’elles sont écrites noir sur blanc dans votre stratégie. Et de lancer 5 avertissements:
• Tester à l’ancienne. Le processus classique consiste à faire des tests en « focus group » et des enquêtes consommateurs dont les conditions mêmes (groupe, salle de test, facilitateur, trac, humeur du jour…) influencent les résultats. Tester dans ces conditions reste une méthode très théorique et peu fiable si l’on veut récolter des retours.
• Dissonance. L’histoire que raconte le produit et l’histoire que le marketing crée autour de ce produit peuvent différer grandement. Selon Alex Bogusky, seul un travail direct sur l’idée, soit sur le produit ou le service permet de tester les hypothèses et de construire directement le marketing dans votre idée. C’est ainsi que fonctionne Nike.
• Une stratégie n’est pas figée. Le document stratégique est une feuille de route, et doit être ajusté selon l’expérience et la connaissance que vous engrangez en testant les hypothèses. Une stratégie n’est jamais une œuvre finale. Une site ou une application non plus d’ailleurs.
• Répondre à un symptôme n’est pas une stratégie à long terme. Un produit imparfait bien communiqué, est-ce un bon investissement? Une campagne de publicité aura certes un effet de pic (ou pas) sur la notoriété de votre produit/marque/entreprise, mais elle ne vous permettra pas d’améliorer votre produit/service ou de capitaliser sur votre innovation.
• Le temps est élastique. Trois mois c’est court et pourtant c’est le temps suffisant pour que votre concurrent direct mette sur le marché son idée et la teste. Moralité: occuper le terrain et récolter des données est plus intéressant que de ne rien faire.
Alors, prêts pour l’innovation?