ChroniquesRéseaux sociaux

Nous payerons sur les réseaux sociaux gratuits

On parle de paiement et de commerce électroniques sur les réseaux sociaux depuis quelques années, mais les essais brouillons de Facebook n’ont jamais vraiment convaincu. Sous la pression des géants asiatiques du web, les choses commencent à bouger : Twitter, Facebook et Snapchat sont de plus en plus sérieux dans le développement de leurs solutions, tant et si bien que l’e-commerce social pourrait bien représenter une évolution majeure des réseaux sociaux dans les mois à venir. Les banques et les sociétés de crédit sont les premières intéressées.

L’avance asiatique
Si les grandes innovations du web social se dessinent en général aux Etats-Unis puis sont reprises dans le reste du monde, si l’on considère souvent que les acteurs asiatiques du web ne produisent que des copies de Facebook et Twitter, le prochain virage des médias sociaux semble suivre la tendance inverse.

Cela fait un moment déjà que les réseaux sociaux chinois intègrent pleinement l’e-commerce. L’éditeur Tencent notamment a fait de son application de messagerie WeChat une vraie plateforme intégrant toute une série de services d’achat (mini-jeux, restaurants, taxis, comptes bancaires, etc). Lancé à la conquête de l’occident l’an dernier, WeChat est à surveiller de près.

Récemment, Alibaba, le géant chinois de l’e-commerce, a présenté son projet « Smile to Pay » qui doit permettre aux utilisateurs de valider leurs achats en ligne simplement en prenant un selfie. On se souvient d’ailleurs des rumeurs de rapprochement avec Snapchat (et son service de paiement entre utilisateurs Snapcash).

L’application Line, leader au Japon, n’est pas moins active : elle a lancé il y a quelques mois son app mobile LineShop.

E-commerce dans la messagerie
Facebook cherche depuis longtemps la solution pour intégrer l’e-commerce. Après les échecs des boutiques dites de F-commerce, des Facebook Offers, des Facebook Credits ou encore des Facebook Collections imitant Pinterest, le temps presse pour le géant bleu.

Les annonces récentes montrent que Facebook suit désormais le modèle chinois et transforme sa messagerie instantanée en plateforme (1) . L’objectif est d’attirer les sites d’e-commerce sur Facebook Messenger, de leur permettre d’y connecter leur CRM, et de permettre aux utilisateurs d’y suivre leurs commandes.

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Concrètement, qu’est-ce qui va changer dans Facebook Messenger?
● La possibilité de s’envoyer de l’argent entre particuliers, apparemment sans frais de commission.
● L’arrivée d’applications tierces, par exemple des mini-jeux.
● L’arrivée des marques et le dialogue avec les consommateurs, dans une démarche de relation client.

Des gazouillis pour faire payer
La stratégie de Twitter est plus traditionnelle. Quelques comptes privilégiés aux Etats-Unis (artistes, ONG, certaines marques) peuvent publier des tweets comprenant un bouton « Buy now » dans l’app mobile Twitter.

Le tweetos américain qui a transmis ses coordonnées bancaires à Twitter (une section dédiée est déjà visible dans les paramètres de tous les utilisateurs dans le monde) peut ainsi payer directement le produit présenté dans un de ces tweets. Rien n’est rendu public cependant, les achats faits sur Twitter n’apparaissent pas dans la timeline.

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Pour les réseaux sociaux, l’intégration réussie de l’e-commerce, notamment via les app mobiles, est une évolution-clé et leur permettrait de ne plus aborder la monétisation uniquement au travers de logiques publicitaires.

Du paiement mobile à la banque mobile
En octobre dernier, BPCE, deuxième groupe bancaire français, lance S-money (2) et la possibilité de payer par Twitter en respectant une syntaxe particulière. En fait, Twitter ne sert qu’à initier le paiement, qui est ensuite géré par le service S-money.

Quel intérêt de passer par Twitter pour payer? La visibilité des ordres et leur viralité puisque ceux-ci apparaissent sur la timeline. Des associations comme la Croix Rouge, Action contre la Faim, le Téléthon acceptent désormais les donations par ce mécanisme.

Au-delà du paiement mobile, le véritable enjeu est la banque mobile. Certaines banques l’ont compris et aimeraient aller plus loin avec les réseaux sociaux mobiles, comme elles l’ont fait précédemment dans le navigateur web. Quelques-unes ont déjà franchi le pas, FNB South Africa (3) par exemple permet de consulter le solde de son compte via une application Facebook et de souscrire à différents services.

Les réseaux sociaux occupant une grande partie de notre vie numérique, l’objectif de ces acteurs est de développer des services qui nous amèneront, pour des raisons de praticité, à connecter notre compte bancaire personnel. A terme, les réseaux sociaux eux-mêmes pourraient chercher à l’intégrer et à en faire un service en tant que tel.

L’an dernier, Facebook n’a-t-il pas tenté d’obtenir l’autorisation de la Banque Centrale d’Irlande pour devenir un organisme financier en Europe ? Le mécanisme ressemblerait alors à PayPal, les utilisateurs pourraient avoir un compte et gérer une partie de leurs paiements sur Facebook et ses applications liées.

Il reste néanmoins un casse-tête à résoudre : faciliter au maximum l’identification tout en garantissant un bon niveau de sécurité. Les plateformes de réseaux sociaux sont-elles adaptées techniquement aux transactions financières ? Rien n’est moins sûr.

Reste à savoir également si les mobinautes accepteront de confier leurs données bancaires, voire leur argent à des réseaux sociaux pas toujours très respectueux des données personnelles. Le défi est de taille.

(1)messenger.com/platform
(2)s-money.ch
(3)fnb.co.za

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