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« Sans publicité, il n’y a pas de marché ! »

Des initiatives cantonales et fédérales menacent de mettre à mal le marché publicitaire ; c’est l’occasion de prendre le pouls de Communication Suisse, l’association faîtière des métiers de la communication, par le biais d’une interview avec son vice-président, M. François Besençon.

A quoi sert une association telle que la vôtre ?
L’objectif de Communication Suisse est d’optimiser les des conditions cadres pour la mise en œuvre de la communication commerciale. Cela va du combat contre les interdictions publicitaires, la promotion de notre branche mais aussi l’amélioration de la formation pour rendre nos métiers plus attirants.

Notre association participe ainsi au développement législatif, tout en mettant à disposition du marché les outils d’autorégulation, comme la Commission pour la loyauté qui se penche de manière consultative, avant les tribunaux, sur des recours contre des campagnes jugées fallacieuses ou déloyales. L’auto-régulation est finalement l’exercice responsable de notre liberté entrepreneuriale et le meilleur moyen d’éviter une régulation excessive de notre secteur.

Quel est votre rôle dans le secteur de la formation professionnelle ?
Notre but n’est pas d’organiser des cours, c’est le travail des écoles, mais de favoriser une offre de formation de qualité et d’être organisateur des examens fédéraux de la branche. Nous devons nous assurer que l’on forme aujourd’hui les jeunes aux besoins du marché de demain. Cet aspect est particulièrement important pour les régions minoritaires où l’on doit pouvoir assurer l’accès au marché national du travail. Pour se faire, il est vital que le niveau des formations soit équivalent dans toutes les parties linguistiques du pays et que les apprenants romands aient des formations et des examens en français et dans leur région.

Quel est le meilleur argument pour pousser des agences à vous rejoindre ?
Notre rôle d’interlocuteur auprès des autorités fédérales et cantonales bénéficie à tous les acteurs de la branche, pas seulement aux agences. En fait nous nous appuyons sur 4 piliers de membres : les annonceurs, les régies, les agences et les associations sectorielles. Notre activité de lobbying bénéficie à tous car elle se veut responsable et vise un seul but : la liberté d’exercice des métiers de la branche de la communication.

Que pèse le secteur de la communication en Suisse ?
Environ 7 milliards et demi de francs suisses, soit 1,40% du PIB et quelque 22000 emplois : ce n’est pas anodin.

En 2017, la question fondamentale concerne l’agrégation des données média off et online ainsi que le développement de la publicité personnalisée. Quelle est votre position ?
Nous participons pleinement à l’initiative Swiss Media DATA Hub (SMDH), dont le but est de permettre de mutualiser les données média suisses dans le cadre d’une joint-venture à créer par MediaPulse et la Remp. L’aboutissement d’un tel projet devra permettre de définir une audience online unique et peut être atteindre le graal que serait une audience globale valable pour tous les types de contenus (textes, audios, vidéos) et donc pour tous les médias. . C’est une avancée notable pour la recherche média et une mise en valeur de l’inventaire suisse. Communication Suisse ne peut que s’en réjouir.

La préparation de la nouvelle loi sur les médias électroniques, nous mobilise également. Ce nouveau texte de loi est important pour les représentants de la communication commerciale car il pourrait changer l’offre publicitaire dans notre pays. En effet, si la nouvelle loi venait à décider, par exemple, que le service public ne pouvait plus avoir recours à la publicité pour se financer, on verrait alors une baisse importante de l’offre publicitaire. Une hypothèse contraire à nos intérêts puisque nous prônons, sans prendre parti pour tel ou tel média, l’offre publicitaire la plus large possible et de la meilleure qualité imaginable. La publicité n’existe pas pour elle-même mais parce qu’elle est au service de l’économie. Sans publicité, il n’y a pas de marché.

D’autres menaces se profilent en 2018, notamment les deux initiatives « No Billag » et « Genève, zéro publicité ». CS a rejeté ces deux textes.
Dans le cas de « No Billag », il est important de préciser que CS ne fait pas de politique des médias. Nous ne soutenons aucun acteur en particulier, mais nous rejetons cette initiative pour trois raisons. En premier lieu, elle entrâinerait la suppression de la SSR et de 13 radio-télévisions privées financées par la redevance, ce qui signifierait une diminution importante de l’offre publicitaire. Ce serait une catastrophe pour les annonceurs qui n’auraient plus la pression publicitaire dont ils ont besoin. Par ailleurs, cette initiative entraînerait une suppression de quelque 2000 emplois dans le secteur de la communication commerciale, qui s’ajouteraient au 13’000 emplois des emplois directs et indirects induits par la fermeture des chaînes publiques et privées récipiendaires de la redevance. Enfin, une telle fermeture de chaînes et stations mettrait en question l’offre médiatique, condition sine qua non de la santé d’un pays et de son économie. Toutes ces considérations nous ont amenés à rejeter cette initiative.

L’initiative genevoise se veut tout aussi drastique.
Cette initiative contre l’affichage à Genève est fallacieuse. « Genève, zéro pub » est un objectif que cette votation ne permettrait pas d’atteindre. En effet, ce projet ne vise qu’à interdire l’affichage sur le domaine public. Resterait de facto l’affichage sur le domaine privé, les affiches culturelles et celles sur les transports publics, sans parler de toutes les formes de publicité que l’on retrouve sur les devantures de magasins, sur les voitures ou autres supports qui ne seraient pas touchés. Au total, seuls 300 supports sur quelques 3000 recensés sur le domaine public seraient touchés. Il restera de la publicité à Genève et c’est tant mieux !

En quoi y a-t-il péril en la demeure ?
Cette initiative trompe également les citoyens, car le vrai combat des initiants est avant tout de combattre l’économie de marché. Ces derniers sont contre la publicité parce qu’ils sont contre notre modèle de société.. C’est un enjeu national et pas uniquement genevois.
Le vent des interdictions souffle toujours d’ouest en est dans notre pays. Ce qui est fait à Genève finit par atteindre Zurich. Cette bataille a dès lors un aspect plus que symbolique. Sans compter qu’une interdiction genevoise mettrait à mal la création d’une offre nationale d’affichage.
Concrètement nous avons mis sur pied un groupe de travail chargé de faire un état des lieux du secteur. Rappelons-nous que les concessions d’affichage ont été créées au XXe siècle pour contrôler l’affichage sauvage. Elles ont permis aux municipalités d’obtenir des revenus et d’améliorer le mobilier urbain. Ne revenons pas en arrière !

Moins de publicité dans les rues et sur la Toile… Le remède à ce rejet ne viendra-t-il pas de la publicité ciblée ?
Il est évident que la question de l’acceptance de la publicité est devenue plus aigüe. Notre industrie porte aussi sa part de responsabilité : nous n’avons cessé d’augmenter le volume de publicité, confondant quantité et qualité.
Avec le numérique, la publicité peut être ciblée et donc personnalisée. C’est une chance qu’il ne faut pas laisser passer. Augmenter la pertinence, c’est augmenter la qualité et donc l’acceptance de la publicité C’est donc un enjeu majeur pour la branche.

Tous les médias ne sont pas logés à la même enseigne dans cette approche « programmatique ».
Le marché des médias s’est globalisé. Il est par conséquent important que tous les médias puissent avoir recours aux mêmes outils. Or, en matière de télévision par exemple, sans acceptation de la modification de l’ordonnance radio et télévision proposée, la publicité cibée serait possible sur les chaînes étrangères en Suisse mais pas pour les chaînes au bénéfice d’une concession. On défavoriserait justement les acteurs qui fournissent un service au public, qu’il s’agisse du service public ou de diffuseurs privés.

 

Victoria Marchand

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